Pourquoi ecrire ?
Cher Côme,
Je te rejoins sur tes réflexions et sur cette transformation que tu décris très bien : ce passage d’une passion à une occupation. Et j’ai pas non plus forcément de solution à ça.
Mais en soit, je crois que j’y trouve un certains plaisir. Sans verser dans le wanabee entrepreneure bien sur, je crois que j’aime bien cette idée de monter des projets (encore plus si ils impliquent d’autres personnes parce que mine de rien, c’est aussi très stresant et puis le collectif, c’est important). Donc j’embrasse un peu cette vibe même dans ses tréfonds les plus profonds et les plus administratifs. Le jdr m’a ainsi révélé une passion obscur pour la compta à laquelle je m’adonne avec autant de plaisir que de culpabilité. Et je sais que je finirais toi aussi par t’entrainer dans mon paradis artificiel de tableurs excels. Ou au moins, je sais que tu écriras probablement un jeu sur la question !!
Mais du coup, ta question m’en ammène une autre (et ainsi s’ammorce la spirale infernalle, la pompe de la descente vers la reflexion et le dooming)
“Pourquoi écrire ?”
Et oui, finalement qu’est ce qui fait qu’on accorde autant d’importance à écrire ? Alors qu’en fait, on pourrait juste jouer ?
Et bien, je pense que ya plein de réponses à cette question mais si vous le permettez (et si vous le permettez pas, je le ferais quand même) j’aimerais dévelloper quelque chose autour de l’archive.

Bon, déjà, je vais poser ici que je suis fascinée par la question de l’archive et de la mémoire (bigup à mon maitre de stage de troisième des archives départementales de la Haute Vienne si tu passes par ici). En tant que personne queer, découvrir que d’autres personnes ont existé.es avant nous, comprendre leur pratiques… C’est lever à chaque fois le voile sur un océan inconnu et célebrer des existences disparues.
Cette petite digression posée, quel est donc le rapport avec le jdr ?
Et bien, je pense qu’on peut considérer les livres de jdr comme une archive.

La première archive, celle à laquelle je pense immédiatement, c’est la campagne. Combien de campagnes du commerce ne sont en réalités que des transcriptions (plus ou moins rigide) de la campagne d’une table mis en forme ? J’imagine que toi aussi Côme, tu as de ces vieux livres de campagnes tradi dont tu ne sais pas trop quoi faire et qui tentent aussi de retranscrire par le papier une table qui a durée 10 ans entre 1995 et 2005.
Alors, on peut trouver ça rigide, indigeste (et ça l’est souvent si on veut en faire une partie de jdr) mais mine de rien, ces textes sont une archives de moments, de pratiques et de personnes et ils documentent le jdr (au sens de la partie) à leur manière.
Bon mais une fois cette archive (pas la plus intéresante je te le concède) évacuée, il en existe une autre. Et celle-ci, c’est carrément la base de jdr (hop, ça namedrop les termes techniques). Alors, je parlerais plutôt ici de la base des jdr indés parce que je les connais mieux (et qu’on ne se refait pas) mais en soit, ma reflexion s’applique aussi au tradis.
Ces bases sont souvent la documentation de mode de jeu, de pratiques et des réflexions de leurs époques. Le cas le plus parlant me parait être Dream Askew qui est entre autre la mise en livre de pratiques de la table de Avery Alder autour des jeux PBTA. Ces livres consignent des pratiques, les transmettent bien sur mais aussi les sauvegarde. La table d’Avery Alder n’est peut être plus, mais je peux tenter de comprendre ce qu’elle a été par son livre.
Souvent, je m’interroge (j’angoisse) sur ce qu’il restera de toute nos actions, des plus infimes au plus conséquentes. Le jeu étant évanescent par nature, il s’enfuit dès que les gestes qui le font naitre sont pratiqués. J’espère que de nous, resterons au moins les textes.
Je cloturerais enfin sur cette citation de Joan Nestle1 des archives lesbiennes américaines (qui ont des problèmes de conservation et de représentation bien plus importants que nos petits soucis de joueur.euses):
“les racines des Archives résident dans les voix silencieuses, les lettres d'amour détruites, les pronoms changés, les journaux intimes soigneusement éditées, les photos jamais prises, les distorsions euphémisées que le patriarcat laisserait passer.”
-Le Jeu du Papier plié-
Bon pour vous remonter un peu le moral, je vais vous parler de mon papier préferé !
Le Munken print white 1.5 115 gr
C’est un papier légerement bouffant qui offre une main et une texture vraiment incomparable. Je vous ais mis une photo pas trop parlante mais en vrai, au touché, c’est incomparable (C’est le papier qui ais utilisé dans la BD : La Manticore pour les connaiseur.euse)
Quiconque m’offrira une ramette de ce dernier aura mon coeur capturé.

Merci de vous être laissé entrainé dans mon dooming personnel, j’espère que ça vous a plus que j’ai pas dis trop de bétise et je vous salue tout plein !
Milouch
1 Oui, celle qui parle à l’oreille de Dorothy Alisson et dont j’ai parlé dans l’Arrière Queer
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