La compote de Côme - Le p'tit top à la compote de 2024 de Jérémie
Y a pas que moi qui cause de trucs culturels !
Santo, el enmascarado de plata
En 2024, j’ai commencé à regarder les Santo. Santo était une superstar mexicaine des années 40 à 80, le premier luchador à avoir ses propres comic books dès 1952 (ils seront publiés de façon continue jusqu’en 1987). En 1958, il débuta au cinéma dans Santo contra cerebro del mal. Il enchaîna 53 films jusqu’à sa mort en 1984, soit une moyenne de deux par an, avec des pointes à cinq au tournant des années 60-70.
J’en ai vu la moitié environ. Santo s’oppose à des bandits, des savants fous, des créatures surnaturelles, on est immergé dans la série B populaire mexicaine de l’époque. En plus d’être le protecteur des braves gens, Santo est aussi un défenseur du patriarcat (Santo vs. las Mujeres Vampiro), un super-héros détenteur d’une cagoule magique (El hacha diabólica), un détective qui potasse ses dossiers (Profanadores de tumbas) ou un agent secret d’Interpol à la James Bond (Operación 67). Il affronte des vampires, des sorcières, des extra-terrestres ou des terroristes internationaux. Il remonte le temps, lutte contre un jaguar à mains nues et sauve son pays, toujours affublé de son masque et de sa cape (qu’il abandonne pour un pull et une veste à partir de la deuxième moitié des années 60).
Objectivement, ce n’est pas bon. Les productions sont quasi-systématiquement fauchées, avec des intrigues minimalistes et stéréotypées. On a souvent le droit à des chansons et à des combats de catch sans aucune justification autre que « ah, désolé, je ne peux pas vous aider pour l’instant, j’ai un match de catch ». Il s’en dégage toutefois une naïveté rafraichissante de nos jours, loin des blockbusters contemporains. À noter sur le sujet le blog de référence de David Witt, qui a fait un énorme boulot de recherche sur Santo et auquel je me réfère régulièrement.
Cinéma japonais des années 60 et séries de la Daiei
Le gros évènement de l’année pour les fans de cinéma japonais fut la rétrospective Misumi à la Cinémathèque française. Misumi fut un réalisateur phare de la Daiei, longtemps ignoré car ayant surtout travaillé sur du cinéma de genre et de série (dans le sens série de longs métrages). Au Japon, il était en effet très courant quand un titre fonctionnait bien sur grand écran de tourner une palanquée de suites aux liens parfois minimes. Les exemples les plus connues sont Tora-san (50 épisodes, record dans l’histoire du cinéma), Godzilla (33 japonais et 5 coproductions nippo-américaines) ou Zatoïchi (26 épisodes). Misumi œuvra sur cette dernière ainsi que sur les sagas Baby Cart, Nemuri Kyôshirô ou Daimajin.
Outre les Misumi, j’ai regardé d’autres séries de la Daiei des années 60, la plus remarquable d’entre elles étant leur série noire, onze épisodes sortis entre 1962 et 1964 généralement centrés sur des machinations économico-politiques dans le milieu industriel. On y retrouve fréquemment les mêmes acteurs et actrices dans des rôles différents selon les épisodes. La qualité est variable, c’est globalement correct avec deux titres au-dessus du lot, La voiture d'essai noire et Le train super-express noir, tous les deux mis en scène par Yasuzô Masumura. Ce n’est pas forcément un réalisateur que j’affectionne mais il faut admettre que ses opus sont toujours meilleurs que ceux de ses collègues. C’est souvent lui qui initie les séries et il laisse ensuite sa place à des tâcherons. Il instaure ici une ambiance tendue de film noir à la japonaise, avec une vision assez critique de la société. Il y a en tout cas pas mal de nombreuses pépites dans ce cinéma de studio des années 60, vaste univers méconnu en Occident.
Garo
Après la lecture en juin dernier de l’excellent livre de Claude Leblanc La révolution Garo, 1945-2002, je me suis mis à récupérer des mangas d’anciens auteurs du magazine Garo. Il fut un gros promoteur du gegika et des histoires autobiographiques (watakushi manga ou « manga du je »), contribuant à la reconnaissance de gens comme Shigeru Mizuki, Yoshiharu Tsuge, Shôhei Kusunoki, Shin'ichi Abe ou Yoshihiro Tatsumi. Excepté Mizuki, ce n’est a priori pas trop mon truc mais je me suis forcé à surmonter mes a priori.
Ça n’a pas toujours été convaincant et je suis parfois resté dubitatif, que ce soit devant l’œuvre de Yoshiharu Tsuge, de Mizumaru Anzai, d’Oji Suzuki ou d’Usamaru Furuya (autant j’ai apprécié la bizarrerie de son Palepoli, autant j’ai détesté Litchi Hikari Club a priori plus représentatif de son style). J’ai en revanche eu de belles surprises. Je citerais notamment La petite amie de Minami de Shungiku Uchida , Nekojiru manju de Nekojiru ou Miss Hokusai d’Hinako Sugiura.