La compote de Côme - Le p'tit top à la compote de 2023
ANTE-SCRIPTUM :
Hop, nous voici en 2024, et nous voici sur une nouvelle plate-forme ! Je t'en ai déjà parlé ces dernières semaines, cette plate-forme ci m'a l'air plus éthique, et donc, sans surprise, elle est payante. Si tu veux me filer un coup de main pour l'hébergement, tu peux donner un petit quelque chose par là ; note que je n'ai besoin que de $9 par mois donc surtout ne me donne pas plus ! J'insiste, je saurais pas quoi faire d'éventuels brouzoufs supplémentaires dont je n'aurais pas besoin…
Sans transition, ouvrons l'année avec mon p'tit top de la compote de l'an passé ! J'ai déjà reçu les tiens, un peu, mais n'hésite pas à m'envoyer ce que tu considères comme le nectar de 2023, je le publierai la semaine prochaine…
Les 3 meilleurs jeux vidéos auxquels j'ai (re)joué en 2023
En 2023, j'ai parlé de 20 jeux vidéos (6 de moins qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
Reventure - Début 2023, au détour d’une discussion de réveillon, j’ai repensé à (et reparlé de) Reventure, et il ne me fallait pas d’autre excuse pour me replonger dans ce jeu pixellisé dans lequel le but n’est pas tant de sauver une princesse des griffes d’un seigneur du mal que d’explorer les 100 fins différentes à cette histoire basique. On ramasse une épée ? Certes, mais que se passe-t-il si on attaque le sage de la montagne avec ? Et si on l’affûte sur une pierre ? Et si on sauvait la princesse mais qu’on prenait ensuite le mauvais chemin pour s’enfuir ? Et si on la ramenait chez soi au lieu de chez elle ? Et si on faisait un câlin au dragon au lieu de le tuer ? Et ainsi de suite, jusqu’à l’absurde et souvent en rigolant beaucoup. Mais là où Reventure touche au génie, c’est qu’il va au-delà de ce concept déjà très chouette, en proposant des fins qui changent définitivement l’environnement du jeu (parfois graphiquement seulement, parfois modifiant plus ou moins le gameplay), sans parler des incontournables zones cachées qui viennent ajouter encore à la richesse d’un jeu qui est bien plus qu’une blague avec des pixels autour.
The Legend of Zelda: Tears of the Kingdom - Je n’aime pas les jeux en monde ouvert, car ils empêchent fondamentalement de respecter la règle de cette compote qui dit que je ne parle ici que des choses terminées (une règle qui a ses exceptions et ses variantes, ainsi pour les jeux de société, mais je m’égare) ; et quand peut-on dire qu’on a terminé un jeu comme Tears of the Kingdom ? Quand on a atteint la cinématique de fin, certes, mais il me restait tant de choses à faire pour explorer le jeu, tant de quêtes à accomplir, de grottes à découvrir, de personnages à dénicher… C’est la même formule que Breath of the Wild, en encore plus « ADHD friendly » : partout où l’on va il y a quelque chose à voir ou à faire, et il est rare qu’on atteigne le but qu’on s’était fixé du premier coup, à moins d’avoir une volonté de fer. Il y aurait tant à dire sur ce jeu merveilleux : comment il prend nos habitudes à contre-pied en tordant le décor et les pouvoirs dont on dispose ; le rajout de deux couches au bac à sable principal ; l’apport d’une vraie histoire… Alors certes, les deux couches en question sont un peu vides, l’histoire se marie mal à la non chronologie, et j’aurais tellement aimé jouer Zelda elle-même ; certes, je suis allé battre le boss final (comme souvent plus facile que les simples streums affrontés avant) par lassitude plus que par envie ; mais un jeu qui m’a apporté presque une centaine d’heures de divertissement sans que je les vois passer vaut forcément son pesant de cacas d’or. Prochaine étape, l’océan ?
We <3 Katamari Reroll + Royal Reverie - Je me souviendrai longtemps du moment où l’ami Stéphane, avec un petit sourire entendu, lança We <3 Katamari sur sa Playstation 2 sans me prévenir le moins du monde de ce que j’allais découvrir. Il n’y a jamais eu, avant ou après, de jeu aussi fondamentalement bizarre (dans l’acception japonaise du terme) : tout, de la musique aux graphismes, en passant par les bruitages et même par les principes fondamentaux du jeu, nous font sentir qu’on est en présence d’un OVNI, un objet vidéoludique impossible à classifier proprement. Car enfin, que dire de ce 2e opus d’une saga où le gameplay consiste principalement à enrouler des trucs pour devenir de plus en plus gros, d’une gomme à un continent entier ? Derrière ce principe simplissime se cache ici une variété incroyable de façons de faire, certaines rigolotes et d’autres frustrantes, faisant du jeu aussi bien un défouloir relaxant qu’un vrai défi à relever, selon les sensibilités. Car si on accède à son générique de fin sans trop de souci (générique qui est lui-même un mini-jeu, comme d’ailleurs la plupart des sous-sections de We <3 Katamari) en rigolant du côté méta de cette suite, il y a dans tous les recoins des choses à dénicher, des niveaux à débloquer, de nouveaux défis encore plus difficiles et/ou ridicules qu’avant… Sans compter que ce remaster avec son titre à rallonge ajoute de nouveaux niveaux, de nouvelles petites choses à collectionner, la possibilité tant attendue de parcourir certains niveaux sans limite de temps… C’est un très attendu coup de chiffon sur un jeu qui était déjà un chef d’œuvre, dans lequel je vais continuer à me perdre une bonne semaine encore !
Les 3 meilleurs documentaires que j'ai vus en 2023
En 2023, j'ai parlé de 17 documentaires (5 de moins qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
Ma première brasse - Ça fait un moment que nous sommes fans de Luc Moullet avec Camille, surtout ses films les plus absurdes et acides ; et ça fait longtemps que Camille adore sa danse sur fond de "Pop Corn" qu’elle montre régulièrement à ses étudiants. Il était donc plus que temps de regarder ce moyen métrage, qui s’intéresse à la volonté de Moullet de conquérir sa peur de l’océan et, par la même occasion, d’enfin apprendre à nager à son âge avancé. Je ne vais pas te dire s’il y parvient ou pas, mais ce que je peux te dire c’est que, pour qui aime ce genre d’ambiance décalée, c’est à mourir de rire !
Le Kiosque - Il n’y a décidément que Tënk pour proposer des documentaires d’une telle qualité (et dont on n’aurait jamais entendu parler par ailleurs)… Ainsi ce Kiosque, où la tenancière d’un kiosque de presse dans le 16e documente son quotidien au fil des années : portraits d’habitué·e·s, petites leçons de choses sur la distribution de la presse, scènes poético-rigolotes du quotidien et quelques moments poignants, voire même un brin d’actualité avec la Manif pour tous qui passe pas loin du kiosque. C’est un joyeux mélange des genres, complètement bricolé dans l’esprit (une sorte de version lo-fi des films de Michel Gondry, et c’est un compliment), qui a fait totalement mouche en ce qui me concerne !
Prière pour une mitaine perdue - Encore un très beau documentaire découvert par hasard sur Tënk, le genre qui fait valoir le prix d’admission à lui tout seul ! Ça commence comme un film sur un département des objets perdus (et potentiellement trouvés) dans le métro de Montréal, beau sujet à lui tout seul, mais assez vite les scènes dérivent sur les témoignages des personnes croisées devant le petit guichet, puis sur d’autres personnes encore (pas mal de français·e·s, étrangement) racontant ce qu'iels ont perdu dans leur vie, et pourquoi ça leur manque. Le tout donne des morceaux de vies très touchants, voire bouleversants, superbement mis en valeur par un noir et blanc tacheté de neige et de longs travellings pour respirer entre deux récits. Et avec, comme promis, une prière au bout (même si elle est plutôt destinée à une tuque, au fond).
Les 3 meilleurs films de fiction que j'ai vus en 2023
En 2023, j'ai parlé de 78 films (45 de plus qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
Adult Swim Yule Log - Il m’est très difficile de parler de ce programme qui s’affiche comme une vidéo de feu de bois, à projeter pendant les longues soirées d’hiver mais qui (tu t’en doutes) devient vite totalement autre chose. Je me bornerai ici à dire qu’il est l’œuvre de Casper Kelly, créateur du court-métrage absolument génial, atroce et hilarant Too Many Cooks (rends-toi service et clique sur ce lien, que tu connaisses déjà la chose ou pas). ASYL a un côté un peu fauché et naturel à la fois, tendre et totalement dérangeant en même temps. Quentin Dupieux et David Lynch seraient fiers.
The Green Knight - L’amie Melville m’avait bien chauffé pour enfin voir cette étrangeté filmographie, et il a fallu attendre quelques mois encore pour que je m’y mette… Mais ça y est, je me suis à mon tour esbaudi devant ce magnifique film d’atmosphère, occupant un territoire à nul autre pareil. C’est une réinvention de la geste du chevalier Gauvain, qui n’oublie aucun détail du récit original sur son chemin (je fais confiance à mes sources sur ce coup, moi j’y connais rien) ; c’est un film qui aurait sa place dans le multivers de Thomas Munier tant ses images débordent de texture, avec des paysages magnifiques et inquiétants et une aura incroyable de la part de tous les personnages. Gauvain chevauche à travers une campagne remplie de créatures qui n’ont d’humaines que l’apparence, à moins que pas du tout, juste pour assurer son honneur face au chevalier vert du titre, et on reste accroché à l’écran tout au long de son périple, jusqu’à une séquence de fin absolument incroyable. Bref, c’est beau, c’est enchanteur, c’est parfait.
Spider-Man, Into the Spider-Verse - Comme le nouveau volet de ma version préférée des aventures de mon super-héros allait sortir, il fallait bien que je me refasse le premier volet histoire de me remettre dans le bain, et me faire plaisir. Eh bien sans surprise, c’est toujours aussi génial : un style visuel tout simplement incroyable, une bande-son qui tabasse, et un film qui parvient à réinventer l’homme-araignée tout en digérant toutes les histoires racontées auparavant. C’est donc un film typique de Spider-Man, mélange délicat (et très réussi ici) d’action, d’humour et d’émotion, dans lequel on ne s’ennuie pas une seconde, et avec l’un des meilleurs génériques de fin que je connaisse. Ça m’a bien mis la patate et l’envie de voir le nouveau ! (Divulgâchage - ça m'a finalement un poil déçu)
Les 3 2 meilleurs spectacles que j'ai vus en 2023
En 2023, j'ai parlé de 4 spectacles (1 de plus qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
APC Catch, Apocalypse V - Après le visionnage de GLOW, avec Camille, on s’est retrouvés à regarder des vidéos de catch sur YouTube en trouvant ça un peu ridicule quand même. Il y avait notamment les gars et meufs d’APC Catch, c’était sympa mais quand même terriblement cheap, on n’y croyait pas trop. Et puis on s’est dit que quand même, en vrai ça devait être autre chose… Alors on y est allés, et purée que c’était bien. Le public était en feu (et faisait au moins la moitié du show) ; les catcheurs et catcheuses se donnaient à fond, et derrière chaque fausse patate il y avait 2 cascades et 3 vrais coups qui faisaient frémir ; il y a eu du drama, des lancers de chaise, des combats hors du ring, un anniversaire surprise, une offre de promotion pas du tout surjouée et même un teasing d’un prochain match pour continuer l’intrigue du soir. Bref, c’était absolument génial et maintenant on n’a qu’une seule envie, c’est replonger dans ce milieu étrangement fascinant !
Romanès, cirque tsigane - Juste avant Noël, nous sommes allés avec Madeleine voir son premier spectacle de cirque, et que comme nous sommes d’indécrottables élitistes il était hors de question de l’emmener voir les clowns de Pinder où autre vulgarité. Il faut dire que ça fait bien des années qu’on aime aller voir le cirque Romanès (Camille a bien dû y aller dix fois avec dix personnes différentes) : parce qu’il a ce côté branquignol si honnête, ou parfois les choses ne marchent pas ou mal mais c’est pas grave, parce qu’il a ce côté tsigane qui nous fait bien plus envie que les choses clinquantes habituelles du milieu circacien, et que ça permet un spectacle de bout en bout habité par de la musique formidable ; bref, parce que les émotions qu’il apporte sont toujours si agréables à ressentir. Et puis Madeleine a trouvé que c’était très bien car il y avait plein de filles qui dansent, on y retournera donc !
Les 3 meilleures séries que j'ai vues en 2023
En 2023, j'ai parlé de 56 saisons de séries (5 de moins qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
Adventure Time: Fionna and Cake saison 1 - Franchement, si ce spin-off d'Adventure Time s’était contenté de montrer les aventures d’heroic fantasy un poil rigolotes de Fionna et Cake, je pense que j’aurais été parfaitement contenté, mais la série va beaucoup, beaucoup plus loin… Je ne sais pas à quel point elle parlera à celles et ceux qui n’ont jamais vu la série d’origine mais pour les autres, oh là là, quelle merveille !! Entre des réponses à des mystères posés il y a longtemps, des clins d’œil par dizaines, et une histoire absolument déchirante le long de 10 épisodes, je me suis franchement régalé de bout en bout. Le tout, bien entendu, avec l’humour décalé caractéristique d’AT, et des choses étranges par poignées (peut-être encore plus que d’habitude)… Je ne sais pas s’il y aura une saison 2 à Fionna and Cake, ni si Adventure Time reviendra sous une forme ou une autre un jour, mais si cela s’achève ainsi, je peux m’estimer parfaitement heureux.
Interview with the Vampire, saison 1 - Peut-être à cause de ma lecture de Vampire 5e plus tôt dans l’année, j’étais assez curieux de voir ce que pouvait donner une adaptation télévisuelle d’Interview with the Vampire, livre d’Ann Rice que je n’ai pas lu et qui avait donné un film iconique de ma jeunesse mais qui a très certainement assez mal vieilli. Je gardais le souvenir de quelque chose de très emo goth, ce qui est assez logique pour une fiction tournant autour de vampires modernes… et c’est exactement ça, mais avec trois aspects remarquables qui font de la série quelque chose de très plaisant. D’abord, et contrairement à l’adaptation en film, ici plusieurs des protagonistes sont créoles au lieu d’être blancs : dans un récit qui se passe au début du 20e siècle en Louisiane, c’est loin d’être anodin, et la question de la race, ainsi que celle de l’asservissement à un maître, est posée frontalement. Ensuite, l’entretien auquel nous assistons est, dans la fiction, le 2e : cela amène tout un tas de commentaires sur les souvenirs racontés de façon contradictoires, comment on peut déformer le récit du passé avec le temps qui passe et les émotions qui changent, et comment Louis le vampire n’est au fond rien de plus qu’un narrateur non fiable. Enfin, Louis et Lestat ont une relation non seulement de confrères vampires mais bel et bien d’amants, ce qui est là aussi fortement mis en avant et donne une coloration queer très pertinente à la série. Avec ces trois aspects mis bout à bout, j’ai apprécié la série bien plus que ce que j’aurais pensé de prime abord, et après le cliffhanger de fin de saison, j’ai très hâte de voir la suite, qui s’annonce plus audacieuse encore…
Mrs. Davis - Le pitch vendu par l’ami Cédric m’avait fait furieusement penser à Dirk Gently, le héros de Douglas Adams ayant connu une admirable adaptation en série, et le nom de Damon Lindelof associé au projet, après les réussites de The Leftovers et Watchmen, avait achevé de me convaincre. On retrouve en effet une certaine folie dans Mrs. Davis, même si lissée et hollywoodienne (enfin c’est surtout moi qui regarde trop de trucs étranges, sans doute) : il n’empêche que je me suis laissé embarquer avec plaisir dans la quête de cette nonne qui cherche à la fois le Graal et à éteindre une intelligence artificielle toute puissante, tout en gérant comme elle le peut la disparition de son père magicien. Non, ce n’est pas un Kamoulox mais un très bon résumé du triangle qui anime la série, toujours au croisement de la science, la magie et la religion, et toujours avec brio. Pour ne rien gâcher, il s’agit ici d’une série en une seule saison, on a donc des révélations à la pelle et aucune frustration liée à des cliffhangers non résolus lorsque se conclut le dernier épisode !
Les 3 meilleurs livres de fiction que j'ai lus en 2023
En 2023, j'ai parlé de 28 livres de fiction (2 de plus qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
Une Fièvre impossible à négocier - C’est un roman qui secoue, pour bien des raisons. D’abord parce qu’il parle d’une plongée dans les fameux mouvements d’ultra gauche qui donnent des cauchemars à notre gouvernement, mais avec une énergie farouche qui donne un instant l’envie de s’y croire et s’y plonger un peu. Ensuite parce qu’il parle aussi de viol, sans y mettre trop de pathos ni de crudité gratuite, juste le récit d’une femme qui en est victime et qui tente de se reconstruire, comme elle le peut. Mais c’est surtout un roman qui secoue parce qu’il a été publié en 2003, et que vingt ans plus tard, rien de ce qu’il raconte n’a vraiment changé : la colère est encore là, la peur aussi, et la fièvre est montée de plusieurs degrés depuis. Je me demande quand elle retombera.
Protag - Dès que j’ai lu la 4e de couverture de ce livre, j’ai su que j’allais en être amoureux, et ça n’a pas loupé : faut dire qu’un roman dans lequel un photocopieur détraqué reproduit avec des dizaines de variantes plus ou moins tordues les clichés du récit d’espionnage, ça semblait taillé pour moi… Protag joue très habilement de son principe fondateur et, de variante en variante, progresse tout doucement dans un récit totalement absurde, vers une non-fin qui ne l’est pas moins. Il est rare que je jalouse l’écriture d’un roman, mais Protag fait partie de ces livres que j’aurais aimé écrire… À défaut, je crois bien qu’il va m’inspirer pas mal pour débloquer un projet qui prenait la poussière depuis deux ou trois ans. Réponse dans autant de temps ?
Renata n’importe quoi - Plusieurs heures de train-des-vacances m’ont permis d’avaler Renata n’importe quoi avec presque la même énergie que la mystérieuse Catherine Guérard a mis pour l’écrire : d’une seule traite, avec une poignée de majuscules et un kilo de virgules, sans aucun saut de ligne et un seul point final, c’est une flèche décochée qu’on regarde avec plaisir atteindre son but. Mais au-delà de la réussite stylistique, c’est également le récit d’un désir de liberté sans aucune concession, poussant l’héroïne têtue jusqu’aux renoncements les plus absurdes, dans un mouvement punk pré-1968 tout à fait jouissif. Un grand roman, dont on ne peut que regretter que son autrice ne l’ait pas fait suivre d’autres étincelles du même style…
Les 3 meilleurs livres de non fiction que j'ai lus en 2023
En 2023, j'ai parlé de 21 livres de non fiction (12 de plus qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
Personne ne gagne - L’amie Eugénie avait mis ce livre dans son top 10 de 2022, la bibliothécaire qui me l’a enregistré n’a pas tari d’éloges dessus : c’était bien parti. Et effectivement tout cela est mérité pour ce bouquin qui te projette de façon magistrale dans les bas-fonds de l’Amérique de la fin du 19e siècle, sans voyeurisme, sans sensationnalisme, avec juste la volonté de l’auteur de témoigner de ce qu’il a vu et vécu dans sa vie sur le bas-côté. On y découvre donc l’itinéraire et le quotidien des hobos, des cambrioleurs et des fumeurs d’opium, des vagabonds de grand chemin et de l’intérieur des prisons, avec un plaisir toujours renouvelé et l’envie de lire encore 1000 anecdotes sous la plume du polymorphe Jack Black. On sent bien que tout n’est pas dit, et le dernier tiers du livre est un peu plus expéditif, mais tout de même, quelles mémoires bien plus passionnantes que tout un tas de romans réunis…
La Femme gelée - Poussé par Camille, je me suis lancé dans mon premier Annie Ernaux, et ce ne sera clairement pas le dernier. D’abord parce que c’est écrit avec ce style incisif qui me fait penser aux pochettes des disque d’Anne Sylvestre : celui des femmes qu’il faut pas emmerder et qui ne s’en laissent pas compter, mais sont capables dans le même temps d’aller creuser dans le quotidien pour en ramener de la littérature. Ensuite parce que, Camille a raison, ce petit ouvrage devrait être considéré au même titre que d’autres comme un manifeste féministe qui ne dit pas son nom (mais qui se cache pas des masses non plus) : de son enfance échappant aux stéréotypes jusqu’à sa vie mariée qui se prend les pieds dans tous les clichés, ça tape sans illusions et ça dézingue le patriarcat l’air de rien, tous azimuts (avec notamment des pages sur la parentalité qui, bien entendu, résonnent particulièrement pour moi et tapent sacrément dures). Un bouquin de revanche, un texte après lequel on se sent plein d’empathie, et avec l’envie d’en reprendre.
À la ligne - Voici une superbe découverte que Camille m’a mise entre les mains, et bien lui en a pris : je ne suis pas du tout branché récit ouvrier et À la ligne m’a mis une bonne claque. Au long de phrases tranchées, qu’on sent portées tout au long de la journée avant d’être posées, et sans jamais de point (car comme tout travail, l’écriture n’a jamais vraiment de fin), Joseph Ponthus nous fait ressentir le monde ouvrier dans tout ce qu’il a de dur, d’injuste, d’horrible, mais aussi de simple, de beau, de fraternel. Le quotidien n’est ici jamais évacué mais il arrive qu’il y perce une certaine poésie qui témoigne de l’engagement de Ponthus à la fois envers son sujet et son traitement, pas comme un écrivain qui se travestirait en ouvrier le temps d’un livre mais bien comme quelqu’un qui est les deux à la fois. Une lecture que j’oserais qualifier d’indispensable, et une grande tristesse qu’après un tel livre, à l’aube d’une œuvre qui aurait sans nul doute été superbe, Ponthus soit soudainement décédé.
Les 3 meilleures bandes dessinées que j'ai lues en 2023
En 2023, j'ai parlé 54 fois de bandes dessinées (6 de moins qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
Blood of the Virgin - Blood of the Virgin est une sorte de BD long métrage, le genre d’analogie que je n’aime pas trop faire mais ici le lien se fait naturellement : à cause du récit, bien entendu, qui suit en partie les affres d’un scénariste/monteur/réalisateur à la noix dans les années 70, en pleine recherche de succès au détriment de son couple ; mais aussi parce que les différents chapitres du livre empruntent volontiers le langage cinématographique pour proposer des montages de cases, des plans d’ensemble et autres effets du même genre. Ça marche du tonnerre, et à partir du canevas de base, on passe par des chapitres autrement plus intéressants dont le lien thématique n’est pas toujours très clair mais forment autant d’amorces de récits qu’on ne lira jamais. Bref, une sacrée réussite !
Bibi avait tout prévu - Les plus assidu·e·s le savent bien, et toi même tu l’avais deviné, je suis fan de l’OuBaPo ; alors un recueil de réinterprétations d’une planche de Bibi Fricotin, tu parles que je saute dessus… Il y a là-dedans pas mal de noms de l’underground de l’underground, et puis quelques surprises un rien (mais alors vraiment un rien) plus connues comme Baudoin (d’ailleurs loin d’être la meilleure contribution du lot). Il y a surtout de tout : des relectures comiques, d’autres sombres ; certaines éclatant complètement les codes, d’autres les respectant presque scrupuleusement ; et bien entendu, certaines de très bonne facture, d’autres assez paresseuses. Un très bel ajout, quoiqu’il en soit, à ma pile de bandes dessinées OuBaPiennes !
Hyper-loto espace - Comme toute personne de bon goût, je suis fan d’Errant Surcouf, que j’ai découvert en plusieurs endroits et d’abord avec Pouvoirpoint, son génial pastiche de bande dessinée de science-fiction. Hyper-loto espace est une sorte de cousin de Pouvoirpoint : il en partage l’humour absurde et décalé, le décor de soap opera et, malgré tout, les scènes d’action pleines d’explosion et de lasers. Il prend cependant un autre chemin que la BD de Surcouf, en multipliant les trouvailles graphiques : changement de style, exploitation de l’espace de la page, doubles pages purement décoratives (ou semblant telles), narration diagrammatique… Bref, sous un dessous finalement assez simplement comique, il y a quelques couches dans ce gros volume qu’il me faudra, je le sens, relire pour tout saisir !
Les 3 meilleurs jeux de société auxquels j'ai joué en 2023
En 2023, j'ai parlé de 24 jeux de société (10 de plus qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
LOK - Je t’avais déjà parlé de LOK en 2022, quand le jeu était un simple PDF dispo sur itch (c’est d’ailleurs toujours et gratuitement le cas). Et voilà qu’une version imprimée est sortie et que je me suis jeté dessus… À mon humble avis, LOK fait partie des grands jeux de puzzle, aux côtés de Baba is You, Patrick’s Parabox ou The Witness, avec cependant une difficulté bien moindre que tous ceux-là. Ça commence tout doucement, avec des mots-clefs à noircir qui permettent de noircir d’autres cases, et puis les mots clefs se multiplient, et le jeu finit par te lâcher la main et trouver tout seul leur effet… Le tout avec un petit graphisme qui fait mouche, et tout un tas de petites choses dont je ne vais absolument rien te dire mais qui sont hautement satisfaisantes. Bref, c’est vraiment un bijou, et quand ça sortira en jeu vidéo plus tard dans l’année, je compte sur toi pour te jeter dessus !
Trio - Trio affiche un visuel d’inspiration mexicaine pour absolument aucune raison, sinon que c’était peut-être la mode à l’époque. C’est un petit jeu très malin, dans lequel il faut constituer des trios (sans déconner ?!) en piochant à la fois dans la main des adversaires et dans les cartes sur la table ; une sorte de mélange de Memory et de stratégie vraiment pas déplaisant, pour des manches durant à peu près 5 minutes et donnant à chaque fois envie de s’y replonger. Si la soirée n’avait pas été avancée au moment où nous nous y sommes mis, on y serait encore…
Cryptide - « Tu vas voir » m’a dit mon frangin en me présentant le jeu, « c’est un peu comme Mastermind ! ». Force est de constater que pas vraiment, mais cela ne fait pas de Cryptide un mauvais jeu : on y retrouve, c’est vrai, l’élément de déduction du jeu poussiéreux, ici en recoupant les indices dont chacun dispose pour retrouver avant ses adversaires l’emplacement d’un cryptide sur une carte plus ou moins abstraite. J’y retrouve ce vrai plaisir de penser pouvoir faire correspondre toutes les hypothèses jusqu’à s’apercevoir que pas du tout, cette plongée dans des notes pour démêler le faux du vrai, l’inquiétude qu'un·e adversaire arrive à la bonne conclusion avant nous… Tout ça avec un matériel qui aurait pu être moins volumineux, mais qui au moins nous change de la grille avec des petits points colorés.
Les 3 meilleurs jeux de rôles que j'ai lus en 2023
En 2023, j'ai parlé de 163 jeux de rôle (59 de moins qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
La Grive noire - J’ai la chance d’être entouré de personnes très talentueuses qui me rendent régulièrement jalouses de ce qu’elles écrivent, ce qui est très bien car ça me pousse de mon côté à faire des choses ambitieuses itou. En un sens, La Grive noire est une sorte d’anti Hôtel du Lion rouge : les deux jeux s’attachent à explorer l’idée d’un jeu sans personnages ou presque, mais là ou L’Hôtel est urbain et coincé dans cette esthétique art déco que j’explore depuis un moment, La Grive noire est résolument rural et ancré dans le 19e siècle ; là où L’Hôtel est un jeu plutôt lumineux, La Grive est plutôt sombre. C’est un jeu où l’on incarne des bouts de décor, des émotions, des animaux, toutes ces choses qui composent une atmosphère de paysage de campagne sur le point de se transformer, pour le meilleur ou le pire. C’est un jeu qui, comme Vagabonder dans les étoiles, précédent jeu de Milouch, s’attache à réinventer la façon dont on prend la parole dans un jeu de rôle, et comment cette prise de parole peut changer la façon de jouer. C’est surtout un jeu que j’ai eu la chance de lire alors qu’il est encore en travaux et qui va être en financement dès le mois prochain : j’ai hâte !
Koriko, A Magical Year - Jack Harrison est un de ces game designers dont je suis plutôt jaloux ; parce qu’il a du succès, bien entendu, mais aussi parce que ses jeux (tous solos à une exception près) sont de petits bijoux de game design, regorgeant toujours d’idées plus chouettes les unes que les autres. Dans ce Koriko, tout s’emmêle comme par magie : le thème du jeu, sorte de variation autour de Kiki la petite sorcière, mais aussi ses mécaniques qui mêlent cartes de tarot, empilement de dés, système de bingo et j’en passe… Koriko reprend le principe désormais très courant dans les jeux solos des amorces autour desquelles broder (avec des questions très orientées), mais avec l’élégance d’amorces pouvant servir dans pas mal de situations différentes et être interprétées de diverses façons selon les circonstances. L’élégance, c’est vraiment ce qui résume pour moi les jeux d’Harrison, et Koriko en est une parfaite illustration, du genre à me pousser à faire encore mieux dans mes futurs jeux !
Yazeba’s Bed & Breakfast - Les lectrices les plus anciennes de cette compote se souviennent que j’avais déjà chanté les louanges de la version démo YBB en 2021 : aucune surprise, donc, à ce que je qualifie cette version quasi-complète du jeu de pur chef d’œuvre. Ce pavé de 500 pages (pour cette quantité et cette qualité, le prix du jeu est donné) est une réussite sur absolument tous les plans : d’abord pour son principe génial d’incarner des personnages prétirés qui vont évoluer dans plusieurs directions possibles (et certaines imprévues) alors qu’on leur fait jouer une cinquantaine de scénarios différents, aussi bien basés sur du dialogue à tête reposée que de l’action frénétique, le tout sur fond très clair de transidentité. Ensuite pour son cadre, évidemment Miyazakiesque et subtilement dévoilé au fil des scénarios-chapitres et des fiches de personnages, sans jamais en faire trop. Et puis ses mécaniques de type “legacy”, qui nous font coller des stickers partout pour faire évoluer les personnages mais aussi le décor, débloquer du contenu additionnel, changer le jeu de fond en comble… Et puis ses dizaines de personnages secondaires qui viennent mettre du bazar dans tout ça, et des chapitres qui gagnent à la fois en complexité mécanique et en profondeur de ton à mesure qu’on joue… Bref, YBB contient au moins une idée géniale par page et je risque de continuer à t’en parler puisque la version imprimée, livrée à la fin de l’année, promet de contenir 2-3 babioles de plus, et surtout que j’aurai d’ici là testé le jeu en fond et en comble, y compris sous sa forme numérique, surprenamment (et peut-être avec succès, qui sait !) tenant bien plus du MMORPG à pixels que du classique tableau numérique auquel on est à présent habitué…
Les 3 meilleurs livres jeunesse que j'ai lus en 2023
En 2023, j'ai parlé de 19 livres jeunesse (3 de plus qu'en 2022) et mes meilleures expériences furent :
Nour, le moment venu - J’ai découvert par hasard les livres de Mélanie Rutten à la médiathèque cette semaine et c’est un coup de cœur immédiat ! J’aurais pu te parler du très beau Les Sauvages, mais Madeleine lui préfère un peu l’histoire de Nour, elle aussi tout en subtilité et en poésie tranquille du quotidien, des petites touches de douceur qui savent ne pas insister pour faire passer leur message. Et surtout, cerise sur le gâteau, les différents personnages secondaires de l’histoire forment une galaxie : chacun·e d’entre elleux a droit à son propre livre-titre, fort bien articulés entre eux !
Contes de la rue Broca - Quel bonheur lorsque, en proposant sans trop y croire de lire à Madeleine des histoires (sans images) de Pierre Gripari, elle accepta sans broncher et mieux, aima ça ! La chanson « Sorcière, sorcière, prends garde à mon derrière » et la fée du robinet sont donc venues refaire irruption dans notre quotidien, après que nous les ayons quittées il y a plus de 30 ans. Des contes toujours aussi chouettes, à peine datés et que je ne me lasse pas de (re)découvrir !
En Quête du dragon - Autre gros succès, ce livre-jeu découvert à OctoGônes en octobre, qui propose quelque chose de plus simple (des choix ponctuels entre 3 options différentes et un découpage en une poignée de chapitres, qui permet des lectures de 5-10 minutes maximum) mais aussi de plus ludique, avec des onglets et des roues à tourner, dont le fonctionnement a été vite compris par l’enfant… On l’a déjà lu au moins 12 fois et je suis étonné que Madeleine, pour le moment, ne pense pas du tout à optimiser ses choix pour arriver à la « bonne fin », préférant reprendre encore et encore les trajets qu’elle apprécie le plus, en dépit du danger. La gamme de livres du même éditeur est florissante, je compte bien m’y plonger !
En 2024,
· Je compte bien lire bien plus de livres qu'il n'est raisonnable, dont un bon paquet de Stephen King
· Je compte bien lire beaucoup, beaucoup plus de jeux de rôles qu'il n'est raisonnable
· Je compte bien découvrir de nouvelles choses plus étranges et tordues les unes que les autres, dans tous les domaines
· Je compte bien sur toi pour t'éclater dans ce que tu découvres et ailleurs, et passer une année de plus de 365 jours !