La compote de Côme #239 - du dimanche 24 août au dimanche 31 (copy)
Multivers, amour et généalogie.
Jeux de rôles

Depths of Reality – Il n’y a pas tant de jeux de rôles qui proposent de grimper à bord d’un sous-marin ; à part l’excellent Bulles j’en ai peu à citer, alors qu’il s’agit d’un environnement qui invite à… quelque chose, j’imagine. Il y a en tout cas une métaphore assez directe à en tirer, comme avec ce Depths of Reality qui explore le genre de l’horreur métaphysique avec un principe extrêmement matériel puisqu’on y déchire la fiche de son personnage à mesure qu’on perd la raison et que les différentes jauges du jeu – ressemblant évidemment à celles d’un sous-marin – augmentent ou baissent. Il n’existe pour l’instant qu’un seul scénario/module mais d’autres sont promis bientôt !

The Invisible Labyrinth – J’adore les labyrinthes, je raffole des embranchements de type multivers, je ne pouvais donc qu’être gaga de The Invisible Labyrinth, qui emprunte sa logique à celle d’un Microscope en proposant d’y multiplier les possibilités causales d’un événement : on détermine un point de départ, plusieurs points d’arrivée, et toute la partie consiste à relier ces éléments. Le tout est peut-être un peu moins organisé que ce que j’aurais souhaité, mais la mise en page du jeu est tellement chouette que je ne peux lui en vouloir !

It Didn't Say Anywhere In The Rules That A Dog COULDN'T Play Basketball – Comme très souvent, Grant Howitt gagne sans se forcer le prix du jeu au titre le plus formidable. Mais, qui plus est, ce jeu du mois va explorer un peu la même veine que son Horse Around the House, soit un certain type d’horreur existentielle lié à la présence d’un animal ; ici un chient qui pourrait être partout et ruiner l’existence des personnages, et dont l’arrivée désastreuse est garantie par l’empilement des cartes sur la table. Je ne peux qu’applaudir un tel bijou de noirceur absurde.

Pale Dot – Je l’ai déjà dit plusieurs fois ici, je ne suis pas particulièrement fan de SF, dans aucun média, mais quand c’est bien fait, c’est bien fait, ma foi. Ici, on est face à un jeu d’exploration spatiale qui retranscrit très bien les sensations qu’on peut avoir avec un Outer Wilds : exploration de l’espace infini, quête métaphysique par petites grappes d’indices agglomérés en sens, et danger à chaque coin de vaisseau. Le tout avec un élégant système qui va emprunter à environ tous les cool kids du moment, mais avec brio !
Littérature

Mrioir, Mioirr – Après mon grand plaisir à lire L’École de la forêt, j’ai poursuivi l’œuvre de Carla Demierre par un tout autre bout : un court texte qui parle d’amour en explorant de façon volontaire une panoplie de formes d’écriture inclusive et d’écriture tout court venant donner au texte un aspect de surprise toujours renouvelée, de poésie se cachant dans les terminaisons et quelques coins où on ne l’attend pas. L’histoire elle-même est sans grande surprise mais avec beaucoup de tendresse, et la postface du petit livre presque aussi intéressante que tout ce qui précède, Demierre y revenant sur sa méthode pour écrire ce Mrioir, Mioirr et les questionnements que cette écriture a soulevée en elle. Tout cela me donne envie d’y revenir encore !
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Hex & the punks, version imprimée – Je t’avais parlé de la sortie en version numérique du jeu : voici que Nimaël vient de m’en livrer 100 petits exemplaires imprimés et que je veux m’en débarrasser au plus vite car ils sont magnifiques ! J’aime tous mes jeux, bien sûr, mais le petit format de celui-ci en fait une sorte de bébé dans ma collection et je sens que je vais lui porter longtemps un regard cher… En tout cas, il fera partie d’un financement participatif en février prochain, mais si tu est trop impatient.e pour attendre de jouer des sorcières vénères, tu sais ce qu’il te reste à faire !
Séries

Taskmaster saison 7 – Je posais la question, après notre découverte de Taskmaster via sa saison 19, considérée par beaucoup comme le haut du panier, de savoir si le reste de la série serait aussi bon ou si cette alchimie ne fonctionnerait qu’une seule fois. Force est de constater que ça marche tout aussi bien avec une autre saison prise presque au hasard : au début, on regrette un peu l’équipe précédente, puis on se prend vite de passion pour ces 5 candidat.es qui ont chacun leurs petites manies, leur costume incroyable (Phil Wang a tout donné) et leur façon bien à elleux de gagner ou perdre. C’est donc à nouveau un succès… Ce qui veut dire qu’on est bien parties pour regarder une vingtaine de saisons (en comptant les éditions étrangères) avec le sourire !

Drag Race France All-Stars - Les saisons de Drag Race France passent et l’aspect compétitif et porté sur une bonne humeur parfois un peu plaquée demeure, et ce ne sont pas mes aspects préférés de l’émission… Mais j’imagine que c’est ce qu’il faut pour en faire quelque chose de populaire que même ma mère regarde. En attendant, cette saison All-Stars nous permet de retrouver des queens aimées des saisons précédentes, et de constater l’immense bond qualitatif effectué depuis. Du coup, difficile de juger quelle est la meilleure quand c’est un enchaînement de costumes et de performances extraordinaires… L’émission sert d’ailleurs de plus en plus de vitrine au show qui en découle, mais ma foi, je ne vais pas bouder mon plaisir de voir plus de drag sur le serviec public !
Film

Portrait de la jeune fille en feu – C’est je crois Milouch qui m’a donné envie de regarder ce film d’amour lesbien que j’avais trop vite négligé lors de sa sortie, et comme j’ai bien fait d’y revenir ! Au-delà des évidences (comme le dit Camille, c’est très reposant, un film sans presque aucun homme), il faut saluer à la fois la performance des deux actrices principales et la photographie de Céline Sciamma qui transforme toutes les scènes en tableau mouvant, posant un œil tendre sur cet amour naissant qui se nourrit déjà de souvenirs, sachant son temps compté. C’est un film sur le regard qu’on porte sur l’être aimé, bien sûr, mais c’est cette question des souvenirs, et de la façon dont ils s’accrochent, qui m’a finalement le plus touché.
Jeu vidéo

The Roottrees are Dead – Nous avions d’abord commencé par la version gratuite et illustrée par IA du jeu, disponible sur itch, mais avec Camille nous avons finalement profité de cette semaine pour nous attaquer à la version complète de ce jeu d’enquête dans lequel il s’agit de reconstituer l’arbre généalogique d’une famille tentaculaire et cachant quelques secrets. C’est un vrai plaisir de jeu que de se plonger dans la masse des documents disponibles (photos, coupures de presse, extraits de livres, recherches sur Internet…) et d’y tracer des connexions, de faire des déductions permettant petit à petit de détisser ce sac de nœuds. Quand la conclusion est arrivée, nous n’étions qu’à moitié surprises (il faut dire qu’on avait un peu abusé du canard-donneur-d’indices) mais ce fut tout de même une satisfaction proche de celle du devoir accompli… Avant de nous rendre compte que nous attendait la suite du jeu, Roottreemania, moins acclamée mais paraissant encore plus tentaculaire...
Musique

D:ve, O – Je continue la plongée au hasard dans ma discothèque et cette semaine c’est ce petit album de musique électroniques qui en ressort. Un petit concentré de compositions minimaliste, qui évoque la nuit, l’eau qui coule, une sorte de placidité. Parfois, comme avec “E:ne Kle:ne Nachm:ttagmus:k”, les boucles s’empilent les unes sur les autres pour construire une sorte de château de verre ; parfois, comme avec “Sunr:se”, il n’y a pas grand-chose d’autre à écouter qu’une longue nappe sonore alternant dans nos oreilles. La plupart du temps, on navigue entre les deux, à travers le genre d’ambiances apaisantes qui nous cueillent à la fin de l’été.
L’arrière-queer de Milouch

Les Oiselles de Thibaud Renzy
Je poursuis mon archive era avec ce petit court-métrage moitié docu, moitié reconstitution que m'a fait découvrir ma compagne.
Dans les années 70, 5 femmes chantent une chanson révolutionnaire et lesbienne du FHAR (Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire) traduite en latin dans la cathédrale d’Évreux.
C'est fou, c'est incroyable et c'est l'histoire sur laquelle Sam va enquêter dans ce film en rassemblant les anciennes participantes de cette action.
C'est vraiment un très beau témoignage avec des portraits de vieilles lesbiennes qui m'émeuvent toujours et où affleure à la fois la radicalité des années 70 et du FHAR (non mais ce nom incroyable) et la tendresse de la transmission transgénérationnelle.
Le mass et la plume

J’ai lu La Justice des Hommes de Santiago H. Amigorena. Je continue mon immersion dans la littérature blanche grâce au prix Folio, où je suis juré. C’est le deuxième livre de la sélection que je lis.
On suit Alice et Aurélien, ainsi que leurs deux jeunes enfants, pris dans une crise qui mènera à une rupture après un drame. Le roman soulève de nombreuses questions : qu’est-ce que l’amour ? Peut-on s’aimer et se détester en même temps ? La justice est-elle vraiment juste pour les couples et leurs enfants ? Le livre ne cherche pas à répondre frontalement, mais à faire ressentir ces interrogations à travers les doutes, les renoncements, les incompréhensions, les trahisons et les espoirs des personnages.
Dès les premières pages, qui frappent par la dureté de ce qu’elles montrent, j’ai été intrigué par le sous-texte. Dans ce que traverse Aurélien et dans ses renoncements, j’ai reconnu des échos familiers. Même sans avoir vécu une telle situation, les doutes et les questions qu’il porte sont universels. Les relations extérieures, qu’elles soient positives ou négatives, prennent aussi une importance décisive. C’est un roman dur, parfois mélancolique, où les personnages se débattent dans leurs propres erreurs, mais qui m’a paru profondément humain.
Sur la forme, le style est fluide et accessible. Le livre se lit facilement, ce qui rend d’autant plus marquants le poids et la gravité de son propos.
C’est un texte auquel je pensais même une fois refermé, un livre qui m’a travaillé. Je ne peux que le conseiller. Note : 8/10
Et toi,
qu’as-tu compoté cette semaine ?
Par ailleurs :
— Jane Austen n’aimait pas grand-chose.
Des bises
et peut-être à dimanche prochain, en compagnie de A Voix et à vapeur.
J'adore