La compote de Côme #194
Des madeleines, des sorcières punk et de la lave en fusion.
Du dimanche 13 octobre au dimanche 20,
J’ai lu :
Danse Macabre - Je ne vais pas te mentir, ce que j’ai débuté avec enthousiasme, curieux de connaître les vues de King sur l’horreur, le genre qui l’a rendu célèbre, je l’ai fini en traînant un brin des pieds… Non que je n’apprécie pas ce style propre à l’auteur dans ses bouquins de non-fiction, entre académisme et ton du vieux copain, ou ses digressions sans toujours de rapport avec le sujet du livre, mais c’est surtout que c’est un bouquin figé dans une époque (entre les années 1950 et les années 1980) qui le rend terriblement daté aujourd’hui. Les essais individuels de King sur tel ou tel film, tel ou tel livre demeurent intéressants (surtout, évidemment, quand j’avais les références en question) mais force est de constater, par exemple, que son propos sur la télévision sonne tout à fait faux aujourd’hui, sans parler de l’évolution qu’a connu l’horreur au cinéma dans au moins les 10 dernières années. C’est donc un coup dans l’eau sans doute un peu prévisible, et un peu longuet de surcroît…
Vive la marée ! - J’avais repéré cette bande dessinée dont j’ignorais tout à l’exposition du Centre Pompidou sur la BD, avec deux planches au principe OuBaPien qui ne pouvait que me plaire. L’album repose en effet sur quelques astuces de composition, mais ce n’est pas vraiment son sujet principal : on est plutôt ici dans une déambulation sur et autour de la plage, une collection de vignettes sur le thème des vacances avec aucun autre propos que celui de la promenade bonhomme d’une situation à l’autre, avec un humour variable mais toujours bon enfant et ne dissimulant pas sa tendresse pour le sujet. Une très jolie découverte donc, dont la poésie m’habite encore !
Up Is Out - Voilà un jeu à ranger dans la catégorie « Bof… mais ! ». En surface, il s’agit d’un jeu d’évasion pas passionnant, avec un petit côté Robonimaux dans le principe, mais avec un aspect plutôt malin que je n’avais jamais vu jusqu’ici : chaque personnage peut partir explorer tout seul (dans une partie solo, donc) et revenir armé de connaissances qu’il va partager aux autres… Sachant que chaque personnage a aussi sa spécificité qui permet de débloquer des choses et donc, au bout d’un moment, de rejoindre la sortie ! J’aime beaucoup ce mélange des formes qui m’ouvre des perspectives en termes de game design…
Moi, Fadi, le frère volé tome 1 - Il serait facile d’accuser Riad Sattouf de vouloir continuer à traire la vache à lait et se faire du pognon avec son histoire familiale, mais c’est je crois autre chose qui est en jeu avec ce spin off de L’Arabe du Futur centré sur le frère de Sattouf qui a été kidnappé par son père puis élevé en Syrie. Ce premier tome pose les bases, revisite l’histoire de biais par rapport à des choses déjà lues, et traduit notre sentiment de colère et de répulsion face à ce père prêt à tout, même à détruire sa famille, pour son propre ego. Sauf que l’on sait, grâce aux derniers tomes de L’Arabe du Futur, que Fadi finit par s’adapter à la vie en Syrie, oublier le français, et finalement épouser les valeurs de ce pays… Et c’est ce basculement, présent ici par touches infimes (à noter d’ailleurs un usage intéressant du langage étranger dans les bulles), qu’il va être passionnant de découvrir.
Ulysse 31 - Eh ouais, j’ai pu lire le dernier jeu de Romaric Briand avant que des questions de droit ne le rendent indisponible, popopo ! J’espère que le bougre pourra le republier sous une forme qui contrevient moins au principe du copyright, car le jeu est loin d’être inintéressant, avec notamment un système de jetons interprétés comme des oracles qui vient nourrir les actions et les récits des personnages, et un usage malin de différentes listes de gimmicks qui assurent au jeu de coller à l’esthétique de la série. Vivement, donc !
Madeleine Project - Au départ c’est par un livre que j’ai connu le Madeleine Project, qui se déplie en réalité bien mieux sur Internet : une journaliste trouve dans sa cave les affaires de la précédente locataire et se met à en faire l’inventaire, puis à retracer la vie de sa propriétaire. Je n’ai pas trouvé le livre, ni le projet, si réussi : il s’arrête là où l’on voudrait qu’il commence et son écriture faite pour les réseaux sociaux est un peu agaçante… Mais enfin quel projet formidable, qui me rappelle Cerno d’un côté et Finders Keepers de l’autre. En plus - et cette dernière phrase est dirigée tout particulièrement vers l’ami Cédric - je suis sûr qu’on peut transformer ça en jeu beaucoup plus facilement que l’enquête de Julien Cernobori…
Realm - Ce jeu-là fait partie d’un triptyque qui invente de nouvelles façon de naviguer dans un jeu en solo : utiliser les données de sa date de naissance dans une table aléatoire, ou, comme dans Realm, naviguer à travers les années de développement d’un royaume comme dans un Livre dont vous êtes le héros. Moi qui suis en plein dans une partie au long cours du Dilemme du roi (je t’en reparlerai quand je l’aurai terminée), ça ne peut que m’inspirer !
The Last Number - Dans le genre procédés originaux, j’ai aussi récemment relu ce jeu de rôle publié il y a longtemps sur Trop Long, Pas Lu car il s’agit à ma connaissance du seul JdR utilisant une grille de Sudoku comme mécanique de résolution. L’idée est bien sûr brillante et m’inspire beaucoup ; le thème du tueur en série tout droit sorti d’un slasher est, honnêtement, bien moins ma came, mais il y a plein de bonnes choses à piocher dans ce petit jeu !
Page de pub :
Hex & the Punks - Ça fait déjà un moment que je réfléchis à comment mettre mieux en avant mes petits jeux de rôle gratuits, sur lesquels je passe tout de même un certain temps d’écriture et encore plus de maquette, comme tu le sais si tu suis les billets de mon site. Et il se trouve que j’ai eu récemment une idée pour un hack de mon JdR pas encore sorti Hex & the City, dans lequel on jouerait des sorcières punk qui lancent des pièces de monnaie pour lancer des sorts. Typiquement, le jeu s’est écrit assez vite et un play test a suffi à confirmer qu’il y avait quelque chose de prometteur dedans : mais est-ce que ça vaudrait vraiment le coup de passer du temps à maquette quelque chose qui intéresserait 10 personnes ?
La solution, c’était de proposer le jeu gratuitement, et si je gagne assez avec, je lui fait une maquette aussi jolie que mes capacités le permettent… Enfin bon, c’était le principe mais l’ami Antoine Bauza est passé par là et a allongé la monnaie à peine 30 minutes après la sortie du jeu. Donc je ne saurai pas s’il intéresse vraiment des gens (à part toi peut-être ?) mais j’ai gagné plus d’argent avec que tous mes autres petits jeux sortis cette année, c’est déjà pas mal !
J’ai vu :
Futurama saison 12 - Clairement, je n’attends plus grand chose de Futurama à part une certaine dose de nostalgie et 2-3 gags rigolos par-ci par-là : je l’ai déjà dit plusieurs fois dans cette compote, au bout d’un certain temps toute série s’empâte dans une routine qu’on peut difficilement lui reprocher (ou alors on arrête de regarder). Et c’est à peu près ce que j’ai eu dans cette 12e saison qui, au-delà du premier épisode extrêmement cringe puisque centré sur les Bitcoin, et si l’on ignore quelques topical jokes du même acabit, se laisse agréablement regarder, atteignant même le niveau des débuts de la série dans un ou deux épisodes. Et franchement, c’était plus que ce qu’on pouvait espérer !
Bang Bang! - L’absence totale de subtilité de ce remake de Knight and Day (que je n’ai pas vu) promis par l’ami Jérémie m’a incité à me plonger dans Bang Bang! et mes souhaits furent en effet exaucés. Le héros suinte le cool par tous les pores, l’héroïne est naïve mais est au grand cœur, il y a plein de blagues nulles et de scènes d’action over the top, et je ne parle même pas des chansons. On est dans une espèce de post-parodie qui se prend un peu trop au sérieux dans son dernier tiers mais sans jamais relâcher la pédale d’accélération : exactement le genre de débilité qu’il me fallait pour entamer mes vacances.
J’ai écouté :
King Gizzard & The Lizard Wizard, Live At Red Rocks ’22 - Cette semaine j’aurais pu te parler des 772 minutes de bande-son cinématographique de Buddy Peace, mais à la place je vais te parler des 512 minutes de concert bouillonnant de King Gizzard & the Lizard Wizard. KGLW pour les intimes, c’est un groupe australien de musique à base de grosses guitares saturées et d’énergie en bâtons, qui a sorti 14 albums en à peine 10 ans, et qui a le bon goût de proposer ses concerts en téléchargement gratuits (je découvre avec ce billet qu’ils sont tous sur Bandcamp en plus !). C’est une musique difficile à résumer tant elle est mouvante : parfois elle évoque une voiture qui file à travers l’été, parfois de la lave en fusion ; c’est une musique qui plonge dans les cavernes et en tire des bêtes diverses et variées ; une musique qui pourrait servir de bande-son à un Mad Max imaginaire avec ses envolées qu’on imagine au centre d’un désert brûlant ; qui, même quand elle tente de se faire plus lente finit tout de même par exploser. Bref, une musique vivante, vivace, rebelle, qui éteint tout sur son passage, 8 heures durant. Plus énervé, y a pas.
L’arrière-queer de Milouch :
Valencia
Oh mon dieu que j'attendais cette traduction ! (j'attends tous les livres d'Hystériques et associés mais celui-là, encore plus que les autres).
Valencia, c'est une plongée dans le San Francisco lesbien, SM, TDS et post hippie des années 90. C'est un livre où l'héroïne erre de relation en fêtes pourries, de poésie grandiose en sanglots angoissés. C'est cru, très cru parfois mais d'un cru écrit par une meuf donc expurgé d'un male gaze dégoulinant et où elle montre les relations dans ce qu'elle ont de vrai. Dans leur dysfonction, leur violence et parfois leurs moments de grâce.
Valencia c'est un roman d'errance lesbienne, c'est Kerouac sans le male gaze, c'est les larmes, le sexe et la sueur. Comme un hommage funeste et libertaire aux relations qu'on aime se faire exploser contre soi, tout contre.
Et toi,
qu’as-tu compoté cette semaine ?
Par ailleurs :
- La chaîne Waffle House a le système de commandes le plus inutilement complexe du monde (merci John Oliver !)
- Cette semaine, j’ai découvert le périple du pénis de Napoléon, à ton tour maintenant.
- La musique de Mickaël Mottet n’a jamais vraiment quitté ma vie, mais je n’ai jamais pris le temps d’écouter son podcast Le Morceau caché avant cette semaine : c’est un mélange entre musiques toujours chouettes à découvrir et discussions de passionnés autour du sujet, avec une louche de contraintes par-dessus, donc tout ce que j’aime.
- J’ai aussi écouté cet épisode de podcast à propos de mise en page, de la différence entre le web et le livre et comment circuler entre les deux, de logiciel libre et d’autres choses encore… Mon cerveau a explosé environ 10 fois en une heure, merci Nicolas !
Des bises
et peut-être à dimanche prochain, si tu gardes le smile.