La compote de Côme

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juin 2, 2024

La compote de Côme #174

Du dimanche 26 mai au dimanche 2 juin,

J’ai lu :


Le Chien des Étoiles - Je crois que c’est l’amie Eugénie qui a parlé de ce livre, piquant ma curiosité ? C’était en tout cas un vrai plaisir que de partager un moment le chemin d’un vrai marginal, du genre qui avancent sur les sentiers invisibles, dissimulés par la nuit. L’errance de Gio est sans but et par à-coups (les ellipses se multiplient dans le dernier tiers du livre et reviennent parfois sur leurs pas), sans autre désir impossible à satisfaire que celui de trouver sa place quelque part. J’ai toujours été sensible à une certaine « poésie du paumé » et Le Chien des Étoiles n’a pas été une exception !


Lights - Il restait un sujet, central à la trilogie de Brenna Thummler, à traiter : donner un peu plus d’épaisseur à Wendell le fantôme, notamment en se penchant du côté de sa vie avant la mort, ce qui oriente ce dernier tome du côté du théâtre et de la danse. C’est vraiment un beau récit en pointillés, rempli d’instants touchants et pathétiques, qui sait faire mal quand il le faut ; le reste du volume revient sur les questionnements des tomes précédents autour de l’amitié (à qui on l’accorde et à quel prix) avec un côté “manic pixie dream friend” pas tout à fait convaincant. C’était en tout cas une chouette et douce découverte, un univers parfois maladroit mais dans lequel passer du temps fut un plaisir !


Dead Minutes - Dead Minutes est un jeu inhabituel à plus d’un titre. D’abord par sa mise en page à la fois sobre et efficace, jouant avec sa typographie de manière admirable (on n’est pas au niveau de ces formidables mises en page, mais l’esprit est là) ; ensuite, parce que dans ce qu’il propose (des morts essayant de changer la façon dont leur après-vie se déroule), on ne peut pas gagner, juste rendre les choses un peu moins pires ; enfin parce que les règles sont suivies d’un essai universitaire (dont je me demande à quel point il est parodique tant il ne dit rien, ni du jeu de rôle en général ni de celui-ci en particulier) et de 4 décors pour le jeu, tous écrits comme des nouvelles littéraires. Bref, on dirait bien que Dead Minutes ne fait rien comme tout le monde et si le jeu n’est pas exactement ma came, je suis sacrément content que le paysage ludique de 2024 permette l’existence de telles incongruités !


A Year in Revolt - Un concept comme The Quiet Year ne peut pas vraiment être amélioré : comme d’autres jeux d’Avery Alder, il a fait naître tout un sous-genre de jeux consistant à raconter une histoire tout en dessinant une carte (pff, du déjà vu !) ou simplement dessiner une carte pour le plaisir. A Year in Revolt, donc, ne cherche pas à faire mieux, mais autrement : un jeu où la carte serait celle qu’on déploie pour décider où, nous autres révolutionnaires, allons installer nos locaux et tenter de faire bouger les choses, avec l’appui de la population si possible ; un jeu où l’on ne dessine pas tant une carte que les contours d’une insurrection et de sa répression par le pouvoir. C’est clairement un jeu baigné dans la théorie sur le sujet, ce qui est fort appréciable, et donne, au lieu de coller des post-It sur une feuille, envie de coller d’autres choses plus solides à travers d’autres surfaces.


Elle s’est évaporée - Je suis toujours à la fois content et surpris quand je me rends compte qu’on joue à mes jeux et qu’on apprécie ça ; c’est une des raisons, je ne le cache pas, pour lesquelles je me suis lancé dans la création de jeux de rôle, autrement moins solitaire (et plus rentable) que la création de romans ou d’articles universitaires. Et quel plaisir encore plus grand, quel honneur, quand mes jeux sont revisités sous une nouvelle forme : ainsi l’amie Milouch signe ici un hack d’un de mes derniers petits jeux en date, avec une version toute personnelle. C’est, comme souvent avec Milouch, radicalement queer, et c’est, comme toujours avec Milouch, d’une poésie infiniment fragile et touchante comme je n’arriverai jamais à en écrire. Bref, ce n’est plus vraiment un jeu de retrouvailles mais un jeu d’amours déçues, et c’est formidable.


Hector Umbra - On m’a offert cette BD que je ne connaissais pas du tout et que j’ai trop vite pris pour une sorte de Hellboy allemand, trompé par la citation de Mignola en 4e de couverture… Mais Hector Umbra est assez différent de l’image que je me fais de Hellboy (que je n’ai jamais lu) puisqu’ici, s’il y a des bas-fonds et des créatures étranges, il flotte un climat d’étrangeté entrecoupé d’un humour pas toujours très heureux qui donne un côté plus amateur mais aussi plus original à l’œuvre. Il n’y manquerait pas grand chose pour en faire le début d’une série décente, en réalité… En l’état, Hector Umbra ne m’a pas déçu mais je ne sais pas à quel point je le garderai en mémoire ; il faut dire qu’il y règne une certaine misogynie à travers les pages qui ne m’a pas aidé à l’apprécier.


Hilda et le géant de la nuit / Hilda et le Troll / Hilda et la parade des oiseaux - J’ai continué à lire Bergères guerrières au-delà du tome 1 à Madeleine, mais ça n’a pas marché : l’intrigue devenait plus complexe, plus sombre, les pages plus longues à lire… Pour tenter de l’en détourner, j’ai eu l’idée d’emprunter Hilda et le géant de la nuit à la bibliothèque : j’avais beaucoup aimé la série (à part sa dernière saison, comme tu le sais) et la BD, au moins dans ses premiers tomes, semblait plus abordable à une petite fille de 4 ans et demi. Eh bien, bingo : on est allés chercher les autres tomes ce week-end tant ça lui a plu, après qu’elle m’ait avoué que ça ne la dérangeait pas de ne pas terminer Bergères guerrières. Luke Pearson, vieux rascal, tu marques encore des points !


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Côme Martin point FR - C’est moi qui deviens vieux où on est en train d’assister à la lente agonie du web tel qu’il s’était déployé ces 20 dernières années ? Contenu pourri voir auto-généré, réseaux sociaux complètement éclatés, terrain des extrêmes les plus atroces, terrain pompé par les algorithmes d’apprentissage se prétendant intelligents… Du coup, j’ai décidé cette semaine de mettre un terme à presque tous mes comptes de réseaux sociaux (sur lesquels je n’étais de toute façon plus vraiment présent) et de faire comme si j’étais de retour en 2003 en lançant mon site Internet. Bon, pour l’instant il n’y a rien du tout dessus mais à terme, j’aimerais y ranger ma collection de chapeaux : mes jeux de rôle, bien sûr, mais aussi mes textes littéraires, mes articles universitaires, ma collection de choses trouvées dans la rue (dont je n’ai pas abandonné l’idée d’en faire un livre un jour), et j’en passe… Normalement ce sera moins cringe que mon précédent site créé en 2003, promis ! Et puis, en attendant que ça se remplisse, je vais tester ce que ça me permet d’envoyer comme infolettre, histoire de tout centraliser sous le même parapluie (car je n’ai pas que des chapeaux mais aussi des parapluies), du coup si d’ici 2 ou 3 compotes tu vois l’interface changer c’est tout à fait normal !


J’ai vu :


Bodies - Ça, on peut dire que le premier épisode de cette mini-série sait appâter son chaland : quatre cadavres identiques retrouvés à quatre époques différentes, ça fleure bon le voyage temporel et l’enquête un brin originale, et le tout avec un budget convaincant a suffi pour me plonger dans le reste de la saison. Si Bodies reste très honnête de bout en bout, avec une intrigue bien ficelée qui parvient à garder ses petites surprises même en fin de course, lorsque toutes les pièces commencent à s’assembler, c’est un peu répétitif par moments (parfois littéralement), emprunte un peu trop le chemin du pathos ou de la grande scène dramatique pas tout à fait convaincante, et surtout la résolution du nœud de l’intrigue et des motivations du grand méchant est si ridicule que j’hésite presque à te la divulgâcher ici (sans parler d’un faux suspense en fin de dernier épisode pour annoncer une hypothétique deuxième saison). Bref, c’est loin d’être la série parfaite, mais l’exercice de style est à la fois intéressant et divertissant !


Tajemství Hradu V Karpatech - Une « parodie steampunk tchèque de la littérature gothique avec du slapstick humor dedans », selon mon site de référence en matière de films chelous ? Je ne ferai pas mieux comme description prometteuse, à laquelle j’ajouterai les accessoires conçus par Jan Švankmajer, particulièrement à l’honneur dans le dernier quart du film. Il faut tout de même aimer l’humour des années 80, l’humour tchèque et cette combinaison des deux pour apprécier le film à sa juste valeur, ce qui n’était pas tout à fait mon cas ; sans compter qu’il pâtit d’un rythme en dents de scie qui ne m’a pas aidé à rester intéressé jusqu’au bout.


La Mort Peut Attendre - Chaque année, je vais voir mon amie dont je tairai ici le prénom vu que son nom complet est sur l’affiche : l’année dernière, c’était une tragi-comédie de Tchekov, cette année une comédie-comédie juive, dont l’amie en question a réalisé l’affiche, les décors et une partie des costumes, en plus de tenir 3 rôles dedans !! L’honnêteté me pousse à avouer que le genre de la pièce n’est pas de ceux dont je raffole le plus, avec cette impression d’un empilement de situations diverses liées entre elles par la plus mince des intrigues (et quelques blagues de prout, dont une qui, j’avoue, m’a fait sourire). Néanmoins, quelques saynètes ont fait mouche, tel ce duo de joggueurs semblant tout droit sorti de Marche ou crève, ou ce bon vieux gag du moine tibétain imperturbable emmerdé par des importuns. Et puis, comme le soulignait l’un des spectateurs m’accompagnant, il me manque sans doute une grille de lecture israélo-palestinienne pour saisir quelques-unes des subtilités…


J’ai joué à :


Chants of Sennaar - Après Tunic, le titre qui revenait le plus souvent dans les conversations de « jeux de puzzles autour du langage » était Chants of Sennaar, développé par une équipe française. Sa revisitation du mythe de Babel est très vite assez claire : on croise différents peuples, chacun doté de sa langue, et l’essentiel du jeu va être de comprendre petit à petit ces langues, grâce aux indices contextuels : les symboles qui reviennent au début et à la fin d’une conversation, une glyphe associée à un dessin, une autre donnée par l’équivalent d’une pierre de Rosette… Je ne sais pas si c’était prévu par le jeu, mais je me suis plus senti perdu dans ses grands décors à la Moebius en début de partie qu’à la fin, lorsque je m’étais habitué à sa grammaire ludique et que je remplissais des pages de carnet à vitesse grand V. En tout cas, c’était à la fois une excellente expérience de jeu, et une parfaite inspiration pour un principe similaire que je fantasme pour Un chant d’îles…


J’ai écouté :


Buck 65, Punk Rock B-Boy - Je t’ai déjà parlé de la nouvelle (et jouissive) version de North American Adonis… Je t’ai déjà parlé des compilations de drum breaks… Nous voilà donc face au dernier album en date de Buck 65 ! La fin de la route ! Son titre annonce le programme : ici les chansons taperont dur, feront moins de 3 minutes et iront allègrement piocher dans un son délicieusement old school. Là où King of Drums et Super Dope! se ressemblaient un peu trop, Punk Rock B-Boy installe cette ambiance d’années 1980 fantasmées et alternatives, sur laquelle les titres s’enchaînent, parfois pour rigoler, parfois non. Comme d’habitude, c’est bourré de samples et de références qui parleront aux plus connaisseurs (donc pas à moi) et le flow file à 1000 à l’heure, sauf quand il se calme. Bref, Richard Terfry n’en finit pas de revenir à ses origines, et quand j’entends le résultat, j’espère franchement qu’il continuera !

Mais voilà, c’est tout ce que j’avais à dire sur Buck 65 (jusqu’à sa prochaine sortie). Et au sortir de cette longue épopée, je me demande : est-ce que ça te dirait que je recommence avec un·e autre artiste, ou on se calme un peu ?




L’arrière-queer de Milouch :


La Manticore - La Manticore est une BD pour laquelle j'éprouve des sentiments ambivalents... Commençons par le plus visible, c'est un ouvrage magnifique. Le dessin, la mise en page, l'impression riso, le découpage et même le travail de couverture et de reliure, tout est travaillé, original et super créatif. Le style graphique emprunte beaucoup aux miniature persannes et fourmille de détails... Le découpage de l'action est construit par les décors, avec des nombreuses créations autour du motif... Même le papier utilisé est super cool (d'ailleurs, si tu sais où on peut trouver du Munken Pure Rough 120gr appelle moi au 06 4…). Mais on ne peut juger un livre uniquement à la qualité de son papier et à son impression risographique (c'est pas le téléachat ici)... Et il faut bien le dire, c'est une BD très fouillis et dont j'ai eu du mal à comprendre le récit et le propos. Si je résume, c'est le récit de Shamil, né.e fille mais éduqué.e en tant que garçon pour échapper à la misogynie de sa mère, la souveraine du royaume. On suit son ascension politique et ses questionnements autour de son genre dans une société inspirée de la Perse et de l’Inde. Shamil s'émancipe ainsi en affirmant sa non-binarité et en prenant le pouvoir face à sa mère pour restaurer des coutumes d'acceptations et d'ouverture. Je vous en ai fait un résumé, mais l'ensemble est un peu noyé dans diverses sous-intrigue avec des références un peu ardues à comprendre. Je trouve que la BD se concentre beaucoup plus sur des questions géopolitique un peu mal amenées que sur les questions de genre qui sont à mon sens plus intéressantes au vu du récit mais juste effleurées dans ce dernier... Je suis donc ambivalente vis à vis de cette BD. Je garderais la couverture qui est sublime et se suffit à elle même et je laisserais de coté l'intérieur. 


Et toi :


Mass : The 8 Show est une série coréenne qui rappelle Squid Game. Elle suit huit participants dans un show télévisé très particulier. La première saison compte huit épisodes, chacun durant entre 30 et 40 minutes. La série critique un système où l'argent domine tout. Les pauvres doivent se soumettre aux riches, qui sont souvent dépeints comme irrationnels. The 8 Show met en lumière les inégalités et les abus de pouvoir. Attention, la série est très violente et peut être perturbante. Les scénaristes se sont inspirés de Orange Mécanique de Stanley Kubrick. La violence sert à illustrer la brutalité et l'absurdité du système. La série place le spectateur dans une position de voyeur, critiquant ainsi la télé-réalité moderne où la souffrance est devenue un divertissement. The 8 Show est intense et provocante, offrant une réflexion sur les dérives de notre société.


Et toi, qu’as-tu compoté cette semaine ?


Et sinon :


(le peuple a parlé, je balancerai donc ici les choses intéressantes que je trouve sur les internettes ! D’autres font ça beaucoup mieux que moi, mais ma foi… En tout cas, cette petite enquête m’a permis de repérer les noms de gens qui me lisent depuis longtemps, voire plus que longtemps, et je vous embrasse tou·te·s d’amour !! <3)

  • Apparemment ICQ est mort, même si, comme pour les vieilles célébrités, je pensais qu’il avait disparu depuis longtemps. Il a quand même joué un rôle non négligeable dans ma rencontre avec ma compagne, c’est pas rien !
  • L’ami Julien parle de littérature, de lecture et des métiers de l’édition, et c’est absolument passionnant (malgré le son parfois vacillant).
  • Moi qui réfléchis (de loin, pour le moment) à comment intégrer un langage à décoder dans un futur jeu de rôle, l’annonce d’un jeu de société écrit entièrement dans une langue extra-terrestre m’émoustille pas mal !
  • Il y a quelques temps, je te parlais de Last Week Tonight dans cette compote, parce qu’après tout c’est certes une émission d’infotainment mais elle est découpée en saisons… Sauf que ce n’est pas vraiment évident de dire des trucs intéressants dessus chaque année à part « c’était chouette, j’ai appris plein de trucs et j’aime bien rigoler ». Eh bien, si toi aussi tu aimes apprendre des trucs, rigoler, et John Oliver, et si tu comprends l’anglais sans sous-titres, sache que la saison 11 de l’émission est à présent gratuitement disponible sur YouTube, les épisodes complets étant mis en ligne dès le lundi matin. Allez, tu as environ 444 minutes à rattraper !
  • Parfois, en préparant tes cours tu tombes sur des vidéos absolument parfaites mais impossibles à montrer à tes élèves. Alors, voilà.



Des bises


et peut-être à dimanche prochain !


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