La compote de Côme

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mai 26, 2024

La compote de Côme #173

Du dimanche 17 mai au dimanche 26,

J’ai lu :


Delicates - Comment faire suite au tome 1 de cette série, qui se suffisait à lui-même, me demandais-je la semaine dernière… Eh bien en introduisant un autre personnage et un autre point de vue, pardi ! Dans ce tome 2, il est donc toujours question d’un peu de confiance en soi, mais aussi de comment faire groupe d’une manière qui ne va pas renier ce qu’on est, ni ceux qui nous entourent. La métaphore des fantômes y est un peu plus explicite (parfois trop) mais elle vient ajouter une touche bienvenue à ce qui, sinon, aurait pu n’être qu’un récit de plus sur l’adolescence et son mal-être.


Mekka Nikki tome 1 - C’est l’ami Guillaume qui avait conseillé cette bande dessinée longtemps plus disponible pour cause d’éditeur s’étant cassé la gueule, ce qui explique que j’ai pris du temps pour m’y mettre ! Moi qui ne suis pas particulièrement fan de SF, j’aime ce genre d’univers où, comme dans les BD d’Erwann Surcouf, les personnages sont un peu maladroits, rigolos sans le vouloir, et se mouvant comme ils le peuvent dans un monde plus sombre qu’il n’y paraît. Au fil des 19 premiers chapitres de Mekka Nikki, on voit les enjeux se complexifier, le passé des personnages se révéler (avec parfois un peu trop de flashbacks à mon goût), et ce qui était initialement un petit récit se mue peu à peu en fresque épique. Et j’ai comme l’impression que le tome 2 va aller encore plus loin dans ce sens… Espérons que l’atterrissage sera réussi !


Space Fam - Depuis la formidable émission de Radio Rôliste sur le sujet, je m’intéresse un peu plus aux jeux Firebrands, cette formule à la Mario Party où, pour raconter une histoire, on enchaîne les mini-jeux aux diverses règles et ambiances… En voilà un de plus dans la famille, avec sa petite variation originale : dans Space Fam, qui est un jeu où l’on raconte le quotidien de gens dans l’espace, il y a une vraie volonté d’arcs narratifs, plus visible que dans les autres jeux du genre, avec des débuts, des fins, des événements qui surviennent quand des jauges sont remplies… Je dois avouer que, si je ne suis pas particulièrement attiré par le thème, cette façon de fonctionner correspond davantage à ma propre pratique, aussi je me retrouve dans Space Fam !


Blackwater tome 1 - Je n’aurais pas reproduit l’exploit de l’amie qui a lu toute la saga Blackwater en une semaine : il faut bien avouer, néanmoins, que cela coule entre les doigts, une langue simple qui se lit presque toute seule et à travers laquelle on prend plaisir à découvrir le désordre qui agite une famille bien rangée du début du XXe siècle lorsqu’une mystérieuse femme entre dans leur vie. McDowell ne cache pas une seconde les accents fantastiques de son récit, et dès lors une partie de l’intérêt du livre est cette ironie dramatique permanente : on sait que ça va exploser, que tout va vriller, la seule question est « quand ». Ce ne sera pas dans ce premier tome, qui se contente de faire monter la pression, on verra donc par la suite…


Chess Dancing - Il y a dans Yazeba’s Bed & Breakfast un chapitre où l’on fait danser nos personnages ensemble, pour mieux explorer leurs relations, qu’elles soient amicales, amoureuses ou rivales… Ce n’est pas tout à fait le propos de Chess Dancing mais il y est aussi question d’utiliser la danse comme excuse pour autre chose, ici les tensions entre membres d’une même famille aristocratique. Et quoi de mieux que de symboliser cette salle de bal et ce qui s’y trame par un plateau d’échecs, où chaque pièce serait une membre de ladite famille ? Je ne sais pas exactement ce que tout ça peut donner en partie réelle, et les règles de Chess Dancing me semblent quelque peu fragiles par moments, mais quelle association fructueuse !


A Singular Quest - Je te parlais d’une trilogie de jeux d’Anna Anthropy l’autre jour et il se trouve qu’elle citait cette Singular Quest dans ses inspirations, je suis donc allé y jeter un œil car une page c’est vite lu ! On y retrouve cette idée développée par Vincent Baker dans La Sanglante Quête du Barbare et ailleurs, à savoir un seul héros dirigé par des instances qui sont plus ou moins des MJ mais surtout des conteurs d’une histoire. Ici, ce principe est allié à une seule et unique mécanique, qui sert à raconter les étapes successives d’une quête, obstacles et difficulté comprises, jusqu’à sa complétion. C’est franchement brillant et ça vaut très largement le prix d’entrée !


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La Trilogie de la vie - Allez, promis, c’est la dernière fois que je t’embête avec ma trilogie de jeux financée en février dernier : c’est qu’elle est désormais en accès public pour le vaste monde, en version numérique et imprimée ! C’est ici que j’y vais de ma petite complainte mais néanmoins sincère sur les internettes qui, comme le reste de la réalité, sont en train de doucement se casser la gueule et sur lesquels vendre quelque chose tient de la gageure. Bref, les jeux sont là pour qui les veut, et en boutiques, et en convention !


J’ai vu :


Beau is Afraid - Personnellement, ce n’est pas le nom d’Ari Aster (dont je n’ai vu que Hereditary, qui m’avait laissé mitigé), ni celui de Joaquin Phoenix qui m’a amené à vouloir voir Beau is Afraid, mais la promesse d’un film chelou, bourré de paranoia et de cauchemars éveillé, et durant 3 heures. Je dois vraiment avoir un problème, mais ça tombe bien, Beau-le-défini-par-une-seule-émotion aussi, et c’est un plaisir mêlé d’angoisse que de partager son long chemin à travers la concrétisation d’à peu près toutes ses peurs les plus réfrénées. En tout cas, c’est le cas pendant une première heure totalement délirante, à un niveau que j’avais rarement vu au cinéma : malheureusement, ça s’embourbe un peu ensuite et je n’ai jamais réussi à totalement retrouver ce plaisir du premier acte, même dans la dernière demi-heure qui vient retrouver un peu de cette folie (mais, hélas, mâtinée de psychologisme évident qui vient un peu diminuer l’impact du tout). Bref, je conseillerais volontiers à Ari Aster d’aller consulter plutôt que de continuer à s’épancher dans ces films, mais d’un autre côté je suis assez content que ce genre de projets mégalo-démentiels continue d’exister dans le cinéma d’aujourd’hui.


J’ai joué à :


The Pedestrian - Si The Pedestrian n’était qu’un jeu de plate-forme avec des niveaux qu’il faut relier entre eux et deux/trois énigmes sur le chemin, ça en ferait un gentillounet jeu sur lequel il ne serait pas très utile de s’arrêter. Mais son idée géniale, c’est de faire d’un petit bonhomme de signalisation son héros et de la ville son terrain de jeu : derrière chaque niveau, des décors urbains en arrière-plan, et nous qui évoluons à travers… Ça n’en rend pas le jeu meilleur mais tellement plus sympathique à traverser, et même si le tout dernier acte du jeu nous balance sans prévenir un changement de paradigme et un fil narratif pas tellement présent jusqu’ici, on pardonne volontiers à The Pedestrian tant c’est un jeu plein de charme !


J’ai écouté :


Buck 65, No Children / 14KT Gold - On arrive presque au bout de ces chroniques sur Buck 65, dis-donc ! Mais avant de parler de son tout dernier album en date, il faut faire un ou deux détours, à commencer par une compilation parue avant Super Dope! et un petit EP sorti juste après. No Children est une collection de 25 chansons oubliées sur le bas-côté mais suffisamment intéressantes pour les ressortir sous cette forme : et crois-en un superfan, il y en a beaucoup, beaucoup plus qui restent dans l’ombre… Toujours est-il qu’on trouvera sur cet album, pêle-mêle, les pistes de Unhip dont je t’ai déjà parlé mais aussi des outtakes de Man Overboard, des démos des Sebutones, de Weirdo Magnet et de Situation, des vieilleries mythiques, un peu de chœurs féminins et même un ou deux (ou trois inédits). Bref, une chouette manière de faire de la place pour la suite… De 14KT Gold, il n’y a au fond pas grand chose à dire puisqu’il s’agit d’un supplément à Super Dope!, avec donc le même son, la même ambiance : une intro funky, un interlude de piano combat, et quelques chansons entre les deux, comme celle-ci qui n’aurait pas été de trop sur un des Dirtbike. Vu la qualité de la production, on ne va pas se plaindre d’un peu de rab !


L’arrière-queer de Milouch :


Dans la Maison rêvée - Il y a des livres qui sont intenses, d'autres insipides. Certains que je relirai avec envie et d'autres dont je me suis débarrassée. Dans la Maison rêvée ne rentre pas dans ces cases. Dans la Maison rêvée est un livre qui fait peur, qui m'a fait ressentir une certaine forme de terreur et en ce sens, il est parfaitement écrit car c'est son but. Dans la Maison rêvée raconte l'histoire d'une relation abusive au sein d'un couple lesbien du point de vue de la victime. L'histoire, le schéma d'emprise... sont assez classiques. L’originalité du texte se situe dans le fait que chaque chapitre est écrit d'une manière un peu différente : à la manière d'un voyage, à la manière d'un livre dont vous êtes le héros, à la manière d'une prémonition... Je n'ai personnellement pas trouvé que ces réécritures modifiaient profondément le style du bouquin et je n'y ai pas vu le tour de force littéraire qu'on aurait pu en attendre. Cependant et c'est la force de ces réécritures, c'est qu'elles reracontent à chaque fois l'histoire. Avec des points de vue différents, pas dans le même moment de la relation... Cette sensation de répétition à la fois différente et semblable est pour moi le tour de force de ce livre. On ressent le ressassement de la violence domestique, son inéluctabilité, comme une spirale temporelle qui s'enferme de plus en plus sur la lectrice. C'est un livre glaçant et c'est un livre excellent. 


Et toi :


Mass : J’ai vu The Beekeeper de David Ayer avec comme rôle principale, Jason Statham. L’Apiculteur s'inscrit sans équivoque dans la lignée des films d'action à la John Wick, où un super-homme déchaîné fait régner la justice à coups de poing et de balles. Le protagoniste est un apiculteur, il devient un véritable défenseur de la ruche - la ruche ici symbolisant les États-Unis d'Amérique. En dépit de la simplicité de son intrigue, centrée autour de la vengeance, le film se distingue par l'abondance de ses scènes d'action, dont la plupart sont d'une violence extrême. Le point de départ du film est classique : la quête de vengeance. Cependant, l'intrigue se complexifie en suivant le héros dans sa mission de protection de la « ruche ». Ce n'est pas seulement une question de vengeance personnelle, mais de défense d'un idéal national. Le film juxtapose l'univers des abeilles à celui des humains, où notre héros apiculteur se bat non seulement pour ses abeilles mais aussi pour le bien-être de sa patrie. Les antagonistes du film sont des capitalistes mafieux, représentant une menace pour les plus vulnérables en leur volant leurs économies. Contrairement à une critique du capitalisme en général, le film cible spécifiquement ces criminels modernes qui préfèrent l'argent facile sur ordinateur plutôt que le travail honnête des braves personnes (les abeilles). On retrouve une critique sociale, bien que manichéenne, où les mafieux capitalistes sont les ennemis du peuple. L’Apiculteur ne se prive pas des clichés du genre : organisation secrète de super-hommes, méchants stéréotypés, ancien directeur de la CIA, présidente des USA (évoquant Trump mais avec de l’empathie, du moins à la fin) et bien sûr, le FBI. Parmi ces clichés se démarque l'enquêtrice du FBI, capable de tout comprendre avant tout le monde. Plutôt que de suivre le chemin de la vengeance aveugle, elle choisit le respect de la loi, pour montrer sûrement que la vengeance peut être dépassée, du moins en partie, comme on le voit à la fin du film. Le film, malgré son apparente simplicité et sa violence omniprésente, porte un sous-texte implicite : la justice prime sur la loi, et il faut à tout prix protéger la nation des malfaiteurs, pour que les USA puissent continuer à être cette ruche parfaite pour les travailleuses. Cette philosophie, bien que rudimentaire, est le fil conducteur du film et justifie l'héroïsme brutal du protagoniste. En somme, L’Apiculteur est un divertissement efficace qui, bien que truffé de stéréotypes, offre 1h45 de pure action. Sa violence est parfois difficile à supporter, mais les amateurs du genre y trouveront leur compte. Ce n'est peut-être pas une œuvre qui révolutionne le cinéma d'action, mais elle remplit sa mission : divertir tout en véhiculant un message de justice implacable et meurtrière.


Et toi, qu’as-tu compoté cette semaine ?


Et sinon


Je me rends compte que quitter peu à peu les réseaux rongés par les GAFAM et les algorithmes coûte plusieurs choses, et crée notamment une difficulté à sortir de ma bulle d’informations… Alors je me dis que tu es peut-être come moi, ou que simplement tu aimes bien découvrir de chouettes choses qui ne rentraient jusqu’ici pas tout à fait dans le format de cette compote. Par exemple, cette semaine j’ai écouté une chouette interview de Melville (et pas seulement parce qu’elle chante mes louanges) suivie d’une discussion faisant découvrir les bases des univers émergents en jeu de rôle ; j’ai lu un article déprimant sur la course vers l’abîme de Google & co ; j’ai aussi lu un article déprimant sur le fait que vendre des livres ne nourrit pas grand monde (mais on le savait déjà) ; j'ai découvert le monde merveilleux des serveurs mails (et autres) militants ; et puis, ça date pas tout à fait de cette semaine, mais je me retrouve tout à fait dans cette boulimie impatiente de création de Quentin Dupieux (et, dans une moindre mesure, l’envie de maîtriser un max de chaînons de la production pour créer plus vite). Voilà, si tu as envie que je te parle de ce genre de choses de temps à autre, ou pas du tout, tu peux cliquer là-dessous :




Des bises


et peut-être à dimanche prochain !


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