April 7, 2024
La compote de Côme #166
Du dimanche 31 mars au dimanche 7 avril,
J’ai lu :
Le Casse du continuum - C’est pas tous les jours qu’un roman de Léo Henry (sans ISBN de surcroît !) se retrouve dans la boîte à livres de mon immeuble ! Moi qui n’en ai jamais lu, c’est comme si l’univers m’envoyait un signe… Sans être dans la tête de l’auteur,
Le Casse du continuum m’apparaît comme un bouquin plus mineur que les œuvres plus ambitieuses qu’Henry a sorti ici ou là ; ça n’en reste pas moins un très bon roman, variation SF et métaphysique sur le thème du cambriolage avec une équipe de bric et de broc. Il y a son lot de révélations d’usage, de retournements de situation, de scènes d’action de haute volée (et pas toujours très compréhensibles)… J’ai dévoré ça en un week-end, ce qui est plutôt bon signe ; je l’ai rangé dans ma bibliothèque au lieu de le remettre dans la boîte, ce qui est encore meilleur signe !
Step Into My Coffin, Babe - Je l’avoue, je n’ai pas tout compris aux règles de SIMC,B qui sont plus techniques et tactiques qu’il n’y paraît : mais ce n’est pas bien grave, car j’ai très bien compris le concept, à savoir l’incarnation d’un·e vampire qui profite d’une nuit de congrégation pour chasser (peut-être littéralement) et trouver l’amour de sa non-vie. Il y a donc des profils de candidat·e·s à dents longues plus ou moins recommandables, des décors plus ou moins mortels, des cartes à tirer pour combiner le tout et espérer finir avec la bonne personne avant que le jour se lève… Le tout avec de très chouettes illustrations !
Immortal Gambit - Il y a un certain temps de ça, j’ai rêvé (sisi) d’un système OSR dans lequel les 6 caractéristiques seraient chacune une plage de chiffres sur un d20, de plus en plus larges à mesure que le personnage gagnait de niveaux (si tu as tout compris à cette phrase, félicitations, tu es un·e total·e nerd). Ce n’est pas tout à fait comme ça que fonctionne Immortal Gambit, mais pas loin, ce qui me prouve que cette idée n’était pas totalement stupide ; ou alors que nous sommes deux à l’être ! C’est aussi un jeu de baston entre mécas où chaque personnage a un rôle différent et où l’on ne joue que la grosse baston finale, celle où les alliances se révèlent et se défont. Le genre de jeu apéro à sortir à l’occasion.
Les Nouvelles aventures de Lapinot tome 5 - Dans les choses qu’on retrouve d’un tome à l’autre de cette nouvelle série de Lapinot, il y a : des échanges entre Richard et un autre personnage qui le trouve insupportable mais le tolère quand même ; un personnage féminin qui pète les plombs et qu’on finit par écarter car presque hystérique ; une horde de gens pourchassant Lapinot pour lui casser la gueule ; une ou deux considérations de boomer sur notre monde moderne ; un climax qui surgit soudain et est résolu en deux planches. Malgré tous ces points (qui sont donc présents dans ce tome 5), L’Apocalypse joyeuse est un brin supérieur aux deux tomes précédents et pourrait presque passer pour un album de la première série, notamment grâce à l’ajout bénéfique de Titi dans le cast. Tout cela reste néanmoins bien en-dessous des grandes heures de la série, et si je continue c’est uniquement par complétive…
Isekai PBP - Un lecteur (émérite !) de cette compote me disait récemment que bon, c’est facile de lire autant de jeux indés par semaine vu qu’ils font tous ou presque une page… Ce qui est totalement faux, sauf quand c’est vrai comme ici. Si je te parle d’Isekai PBP c’est que je trouve son idée très chouette : c’est un JdR par écrit, sauf qu’il n’y a qu’un seul héros, que c’est toi-même coincé dans un donjon et que tes potes sont là pour te conseiller sur ce que tu dois faire. Une sorte de show un brin interactif, en somme, pour éviter que comme trop souvent l’expérience du jeu par écrit se tarisse trop vite (je sais de quoi je parle). Et c’est tout ! Et c’est déjà ça !
Pepito volume 3 - Je sais pas, hein. Peut-être qu’il me manque la nostalgie certainement intrinsèque à ce genre de bandes dessinées, mais j’ai eu du mal à voir dans Pepito autre chose qu’une variation sur les bandes dessinées d’action/humour dont Donald et ses potes sont les rois, avec un peu plus d’action frénétique et un peu plus d’humour bas de plafond. Rien de désagréable, bien au contraire, mais de là à rééditer cette vénérable œuvre italienne, je m’interroge… Mais après tout, ma foi, pourquoi pas. Au fond, c’est grâce à cette réédition que j’ai fini par me pencher sur ce titre dont j’entendais parler depuis un bout, sans toutefois être convaincu par le résultat !
Chaque Matin, chaque soir - Cette année j’ai initié un certain nombre de nouveaux projets dans le lycée où je travaille, dont un cours en binôme avec un collègue d’Histoire-Géographie extrêmement sympathique et beau garçon, et je ne dis pas ça uniquement parce qu’il est en train de lire ces lignes. D’ailleurs je profite de cette parenthèse pour te saluer, toi qui lis ces lignes et n’est pas mon collègue extrêmement sympathique, car j’ai eu l’occasion ces derniers temps de constater plusieurs fois qu’on me lit, souvent très silencieusement mais avec non moins d’appréciation, et parfois depuis des années, eh ben ça me fait quelque chose quand même. Mais bref, ce n’est pas de ça qu’il est sujet ici mais de de livre/compte-rendu de projet artistique avec des lycéens qui racontent, tu l’as deviné peut-être, leurs trajets quotidiens vers et hors de leur lycée, avec cette tentative de capturer cette poésie fugitive du bus qui arrive dans le froid, de la musique crachotant dans les oreilles, de ces gens qu’on croise tous les jours sans vraiment les connaître, bref de ces petites choses qui font une semaine, un mois, une vie tout au bout. Les réalisations des lycéen·ne·s sont présentées sans beaucoup de contexte, avec souvent cette touchante maladresse un rien réarrangée, et c’est un vrai plaisir de partager cette fragile approche de l’art. Si j’étais un peu plus doué, je ferais une comparaison avec ce que je te partage ici chaque semaine, tiens !
What Big Teeth - Voilà la raison pour laquelle, tous les matins et tous les soirs, je passe quelques minutes sur itch.io à regarder les jeux sortis ce jour : parce que de temps à autre, je tombe sur de telles pépites incroyables. Figure-toi que l’auteur de ce jeu de rôle dans lequel on incarne des loups-garous se battant le jour contre le salaire minimum et la nuit contre des gros streums a jugé qu’il n’était pas assez fini pour se faire payer pour, alors il l’a sorti gratuitement… Quand je vois la qualité de sa mise en page, la beauté de ses illustrations imitant les gravures sur bois des années 1920, ses douze idées à la page (dont certaines, à propos du rythme d’un épisode, m’inspirent énormément pour Hex & the City), sa mécanique simple et élégante, je me dis qu’il s’agit là d’un absolu banger et que c’est presque une honte de ne pas filer de thune à son auteur !!
Page de pub :
Conversation avec Mathieu Lam Son Leocmach - Pour le 3e mois consécutif (mais où s’arrêtera-t-il ?!) j’ai conversé avec un ami et néanmoins (futur) auteur de jeu de rôle ; et si l’ami Mathieu n’a pas encore son jeu sur les étals du Rayon alternatif, tu le connais peut-être déjà car c’est lui qui se cache derrière la douce voix de Radio Rôliste (et ses montages ingrats). Mais bon, ici il n’était pas question de podcast mais plutôt de bande dessinée, et de jeux de rôle, et de tout un tas de choses entre les deux. Mathieu étant un professionnel, ça a été un grand plaisir de converser avec lui et ça m’a donné envie de continuer ce petit projet pendant 10 épisodes au moins !
J’ai vu :
The Suicide Squad - Parfois, tu as besoin d’un film avec de l’action, des images qui claquent, des répliques ridicules et une sorte de délire global en technicolor pour te vider l’esprit. C’est exactement ce que j’ai trouvé avec
The Suicide Squad, auquel on ne demandera ni cohérence, ni profondeur des personnages, ni intrigue particulièrement profonde : c’est du pur divertissement popcorn avec un casting en béton, des scènes débiles à la pelle, des ralentis pour faire classe et beaucoup, beaucoup de faux sang. C’était parfaitement stupide et j’ai adoré, au point que je vais sans doute jeter un œil à
Peacemaker, la série dérivée du film !
The President’s Analyst - Faut croire que c’était une semaine où j’avais besoin de choses qui détendent, car The President’s Analyst n’est pas d’un meilleur niveau que The Suicide Squad : à vrai dire, il serait plutôt en-dessous… C’est que c’est un film qui, au-delà de son idée de base (le président des États-Unis - qu’on ne voit jamais à l’écran - a un psy à qui il confie ses secrets, du coup tout le monde veut mettre la main sur ledit psy), ne sait pas trop où aller. On a donc droit à des scènes se voulant comiques autour du monde des espions et de la contre-culture des années 60, mais tout est affreusement long et commence à tourner en rond… Jusqu’à une séquence finale sortie d’à peu près nulle part, qui aurait pu propulser le film vers ces sphères si délicieusement cheloues que j’affectionne, mais c’était trop tard. Que de potentiel gâché, tristesse !
J’ai joué à :
Captain Toad: Treasure Tracker - Je me souviens avoir été charmé par ces mini-puzzles qui émaillaient
Super Mario Odyssey, dans lesquels on incarnait Toad au sein de petits décors en 3D isométrique, à la recherche de gemmes cachées, et de la sortie. Je savais que
Captain Toad reprenait (en fait, préludait à) la formule, mais si j’avais su le jeu si riche, j’aurais bondi dessus bien plus tôt ! C’est que
Treasure Tracker est bourré de niveaux (autour d’une centaine, sans compter le DLC !) qui, chacun à leur manière, réinventent le concept de base, comme seul Nintendo sait si bien le faire, ce qui fait qu’on n’a que très rarement l’impression de réexplorer des choses déjà jouées. À cette innovation quasi-constante s’ajoute une montée graduelle en difficulté, ainsi qu’un nombre plutôt conséquent de défis optionnels (et donc totalement obligatoires pour un névrosé comme moi) qui font passer
Captain Toad de la catégorie de « petit jeu sympa » à « jeu surprenamment riche, pour mon plus grand plaisir » !
J’ai écouté :
Buck 65, Neverlove - J’aurais pu, en réalité, te parler de
Laundromat Boogie en premier, étant donné que ce petit album surprise et plutôt sympa est sorti la veille du désastre qu’est
Neverlove (rien que sa pochette, beurk). Gardons-le pour la semaine prochaine et plongeons-nous dans ce drôle d’album créé suite au divorce de Rich Terfry, une sorte de mausolée d’une période de sa vie, et de sa carrière… Ça part pas trop mal, il faut le dire :
“Gates of Hell” est un morceau de sincère angoisse plutôt réussi, avec son refrain hurlé qui fonctionne bien sur mes oreilles, mais ça se gâte dès
la piste suivante où l’on retrouve ce combo « refrain en français chanté par une voix féminine + mélodie pop-chewing gum + paroles franchement peu inspirées » qui hantait
So Much Forever et qu’on va pas mal croiser ici. Et le pire, c’est que ça reste dans la tête, contrairement à l’album précédent… À d’autres moments, ça semble bien commencer, comme
“Love Will Fuck You Up” dont la première minute aurait pu avoir sa place sur
20 Odd Years, jusqu’à ce que le refrain vienne tout foutre en l’air. Non, vraiment, il n’y a pas grand chose à sauver de cet album sur lequel Buck semble parfois n’être que le
featuring d’une chanteuse qui passait par là, à part quelques moments à part :
“Baby Blanket”, avec sa mélodie dénudée rappelant
“Death of Me” sur l’EP
Dirty Work et sonnant du coup plus honnête que le reste ;
“Super Pretty Naughty”, morceau blague, totale auto-parodie qui est tellement
over the top que je la trouve géniale ;
“NSFW Music Video” (sur l’édition deluxe de l’album - ATTENTION, ce clip est réellement très très NSFW) du même tonneau ; “Neverlove”, titre tout à fait honnête qui a le bon ton de laisser ses chœurs féminins en arrière-plan ;
“Ugy Bridge”, pendant encore plus sombre de “Baby Blanket” tiré d’un poème de Marylin Manson… Ce qui est triste, c’est qu’il y a des beaux moments de flow sur l’album, des vrais moments de rap, mais tellement dilués dans de la pop qui colle aux doigts que non, vraiment, je ne peux pas les apprécier. Après cet album, après avoir entendu
“Superhero In My Heart” qu’on croirait tout droit sortie d’une scène de
Twin Peaks (dans le
très mauvais sens du terme) on aurait pu être tenté de jeter Buck 65 à la poubelle, pour toujours ; mais il y eut
Dirtbike 4 un peu plus tard, il y eut
Laundromat Boogie juste avant et il y aurait une renaissance, plus tard, pour continuer de prouver que le rappeur avait bien plus d’un chapeau.
Amanda Palmer and Neil Gaiman, An Evening With Neil Gaiman & Amanda Palmer - Tu te souviens des années 2010 ? C’était le bon temps, [insérer ici référence nostalgique] et Neil Gaiman et Amanda Palmer formaient encore un couple. À l’époque, un triple album avait célébré leur relation, et voilà qu’il est disponible sur Bandcamp et qu’il est bourré de bonnes choses. La trilogie te présente 3 faces du couple : des histoires lues par Neil Gaiman, d’abord, qui écrit aussi bien qu’il lit, ou l’inverse : l’occasion de l’écouter raconter des micro-nouvelles romantiques, une histoire quasi-lovecraftienne ou une tranche de vie hollywoodienne, toujours avec classe. Ensuite, dans le second disque, c’est le couple qui chante et déclame des poèmes ensemble ; comme le crie un·e membre du public, ils sont sacrément coupais ensemble et dégagent une sympathique énergie, qu’il s’agisse de chanter des chansons polissonnes, un hymne à Jeanne d’Arc ou une ode au stalking moderne. Et puis on termine avec des chansons d’Amanda Palmer, une sorte de compilation de ses classiques, plus ou moins revisités : en ce qui me concerne, sa musique me touche toujours autant, aussi bien quand elle chante sa liberté de faire n’importe quoi ou la beauté des poils pubiens que dans son bouleversant hommage à Judy Blume ou à sa mère, et celles des autres. Bref, An Evening… est comme un gros gâteau, qui peut peut-être faire mal au ventre s’il est consommé d’un coup, mais est finalement très digeste comparé à d’autres production du couple, qui finit par se séparer au début des années 2020. Mais ça, c’est une autre histoire, et une autre décennie.
L’arrière-queer de Milouch :
Le Génie Lesbien - Trrreeembllleez lecteur⋅ices de l'arrière-queer car voici le temps où munie d'un livre entre les dents, je viens détruire les fondements de la société avec
Le Génie Lesbien !!! Déjà, tenons-le nous pour dit, c'est un excellent livre et encore plus un récit très éclairé et précis sur les effets du patriarcat dans le monde des médias et sur les questions de représentations. Alice Coffin décortique très bien la façon dont les questions LGBT sont traitées (enfin ne sont surtout pas traitées) dans les médias. Et plus encore, son livre montre comment le patriarcat et la culture du viol imprègnent les discours publics et rendent impossible en France de parler publiquement de ces sujets et de les poser sur la table. Preuve en est que ce livre a provoqué une panique morale XXL lors de sa sortie alors que bon, il n'y a clairement pas mort d'homme...
(vous l'avez ?) Mais au-delà d'une dénonciation salvatrice, ce livre met aussi en avant la force et la résilience des mouvements militants lesbiens. Qu'elles soient américaines ou françaises, les lesbiennes sont là et ont toujours été là dans la lutte contre le patriarcat. S'en prenant souvent plein la gueule pour avoir osé échapper à l'hétérosexualité. Je suis très heureuse qu'un livre mette en avant leur combat ! Et bien sûr comme il est d'usage :
Bravo les lesbiennes !
Et toi :
Cédric : Haute démolition est un roman de Jean-Philippe Baril-Guérard qui raconte la rencontre de Raph Massi, un humoriste québécois qui peine à émerger, avec Laurie, une jeune assistante dont il va tomber follement amoureux et qui va devenir la co-autrice de son premier seul en scène. Laurie va lui permettre de réaliser son plein potentiel, mais la fin inévitable de leur couple va brusquement ramener Raph à la réalité : sans Laurie, il n'est qu'un humain passablement médiocre. Cette rupture va lui faire si mal qu'il va sciemment se saboter. C'est un roman sur la douleur amoureuse dont la lecture fait bien évidemment remonter des souvenirs pas très agréables. J'ai compati envers Raph, mais j'ai tout de même eu l'impression que l'auteur n'aimait pas le milieu de l'humour, qui n'est décrit que sous pires aspects. Entendons-nous bien : c'est un milieu parfois toxique, mais j'ai eu le sentiment diffus que Baril-Guérard (qui est également un auteur de théâtre) n'avait aucune sympathie pour les humoristes. C'est un peu un roman à clés puisque le milieu de l'humour québécois a été secoué dans les dernières années par de nombreux scandales qui servent bien évidemment de twists dramatiques dans cette histoire. Le roman pourrait paraître un peu facile si la réalité n'était pas encore plus prévisible : un des humoristes qui avait été mis au ban de ce microcosme pour des comportements détestables (et qui a servi d'inspiration pour cette intrigue) est aujourd'hui de retour, comme si de rien n'était... Nul doute que ce roman qui passe par le Bordel et le Terminal (deux lieux incontournables de la culture humoristique montréalaise) saura plaire à des clients de Madame Sarfati tant ces lieux sont fréquentés par les mêmes spécimens. À noter que le roman a connu une adaptation en série télé (que je n'ai pas vue).
Et toi, qu’as-tu compoté cette semaine ?
Des bises
et peut-être à dimanche prochain !