La compote de Côme

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mars 3, 2024

La compote de Côme #161

Du dimanche 25 février au dimanche 3 mars,

J’ai lu :


Monica - Ça fait déjà un certain temps que les albums de Daniel Clowes sont de sacrées montagnes russes, qui commencent toujours par nous faire croire qu’ils vont nous raconter l’histoire ordinaire d’une personne normale avant de plonger dans l’extraordinaire d’une façon ou d’une autre. Monica ne déroge pas à la règle : on pourrait croire que c’est le récit de la vie de l’héroïne éponyme, depuis son enfance dans les jupons d’une mère un peu paumée jusqu’à sa vieillesse tranquille, en passant par une fortune inespérée. Mais ce serait ignorer les histoires interstitielles dont on a initialement du mal à comprendre ce qu’elles font là, souvent plein de fantastique et de détails étranges… Et puis tout bascule, comme un pendule, du plus étrange au plus normal, et encore, jusqu’à ce qu’on ne sache plus trop quoi penser face aux dernières pages du livre qui refusent de répondre avec certitude à la plupart de nos questions (ou peut-être que si). Un livre tout en trompe-l’œil, donc, qui tient son pari du début à la fin.


Petit Vampire va à l’école - Je t’ai déjà dit, je crois, que Madeleine s’était prise de passion pour les bandes dessinées. Ça a commencé avec Tom-Tom et Nana, et puis, pour suivre sa cousine qui a le même âge, elle a réclamé de lire les Tintin que j’ai dans ma bibliothèque ; j’ai préféré lui lire des Jo, Zette et Joko (lève la main si tu es assez âgé·e pour te souvenir du Manitoba ne répond plus) mais c’est quand même fort verbeux et pas mal compliqué à comprendre à quatre ans et demi. Et soudain, l’inspiration m’a frappée : c’est que j’ai toute la collection des Petit Vampire, moi ! Le problème, c’est que Madeleine ne veut que des histoires de fille en ce moment… Qu’à cela ne tienne, il suffit de raconter les aventures de « PetitE Vampire » et le tour est joué. J’avais oublié à quel point ces albums sont un condensé de l’univers du Sfar des débuts, tordu, honnête et touchant, avec des histoires parfois très denses et mystiques (La Maison qui n’existait pas) et parfois juste défoulatoires (La Soupe de caca). Et une pointe de sexisme aussi, parce que c’est Sfar tout de même. Bref, j’ai hâte de lui lire encore et encore ces chouettes albums !


Paul à Québec - La série des Paul continue de toucher au cœur dans son humanité et sa façon de magnifier l’ordinaire (et aussi, déso pas déso, la beauté de sa langue québécoise). À nouveau, ça commence d’une façon et ça se termine d’une autre : on pourrait croire qu’il ne s’agit là que du récit de Paul visitant sa belle-famille à Québec (et ce serait déjà très chouette) mais ça se teinte brutalement d’autre chose et la 2e partie de l’album bascule dans des considérations sur la mort (sans trop divulgâcher) qui m’ont, à nouveau, ému et fait me sentir proche du protagoniste. Au fil des tomes, je perçois l’influence sur Rabagliati de certains auteurs de la scène indé nord américaine, comme Seth ou même Chris Ware, mais il y a dans Paul une bienveillance qui me rend l’œuvre beaucoup plus sympathique au stade où j’en suis dans ma vie…


Our Haunt - C’est décidément une bonne semaine pour penser à la mort en souriant à travers ses larmes, avec ce très beau jeu de Rae Nedjadi dans lequel on incarne des fantômes explorant leurs souvenirs dans une maison hantée. Dans la plus pure tradition des jeux “Belonging Outside Belonging”, on incarne à la fois les fantômes et les lieux de la maison et on échange des jetons pour faire des actions, avec quelques subtilités : les actions les plus positives coûtent plus cher que dans la plupart des jeux ”BoB”, et on trouve dans Our Haunt une mécanique de dépense des jetons post-partie qui n’est pas sans rappeler celle qui est utilisée à tort et à travers dans Yazeba’s Bel & Breakfast. J’ai un peu de mal à visualiser ce que donne exactement une partie de Our Haunt, tant le jeu me semble mettre l’accent sur l’intime et l’émotionnel au déficit du narratif, mais c’est vraiment une belle proposition que je suis content d’avoir enfin découverte !


Suspect - Qu’est-ce qu’une enquête, finalement, si ce n’est l’interrogation de suspects jusqu’à ce que l’un d’entre eux soit pris à mentir ? C’est à peu près la base de Suspect, petit jeu d’enquête dans lequel on incarne à tour de rôle l’enquêteur et les suspects, en tâchant pour les uns et les autres de se souvenir de ce qui a été dit précédemment pour éviter (ou pointer) les contradictions. C’est un chouette petit jeu que je verrais bien sous forme de jeu de société narratif/apéro, je suis sûr qu’il aurait un certain succès ! À noter qu’est proposé en même temps un joli kit permettant de créer ses propres affaires criminelles, jolie initiative !


Papa raconte - Ça fait un sacré bout de temps que j’attends de pouvoir faire découvrir à Madeleine l’univers faussement enfantin de José Parrondo et sa formidable poésie graphique, alors quoi de mieux qu’une histoire de princesse pour ça ? Le concept de l’album est génialement méta, puisqu’il s’agit comme le titre l’indique d’une longue histoire de conte de fées à la sauce Trondheim, découpée en d’innombrables gaufriers qui prennent une plombe à lire… Un conte absurde et plein de rebondissements, un vrai plaisir à lire, sauf que comme trop souvent, Trondheim ne peut s’empêcher d’y glisser pas mal de sexisme, des idées assez peu chouettes sur l’importance de la beauté et une importante dose de grossophobie. Quel dommage, car sinon ç’aurait vraiment été l’album parfait, à relire et relire encore…


J’ai vu :


Hilda saison 3 - Sans l’amie Melville, je n’aurais jamais su qu’il existait une 3e et dernière saison de cette fabuleuse série-pas-tout-à-fait-pour-enfants qu’est Hilda, et ç’aurait été bien dommage ! Enfin, à moitié. Je suis vraiment partagé quant à cette 3e saison : d’un côté, c’est toujours un plaisir de retrouver la petite Hilda et ses copaines pas forcément humain·e·s, et de profiter un peu de la bonne humeur communicative de la série, qui n’hésite cependant pas à aller dans des tonalités plus noires quand il le faut. Mais, d’autre part, j’ai trouvé la trame narrative de cette dernière saison très décevante : non seulement elle ajoute un gros paquet de lore à un univers déjà bien dense et qui n’avait pas besoin de toutes ces nouvelles révélations, mais en plus elle le fait de manière un peu maladroite, en insérant au milieu d’une saison plus courte que les autres 2-3 épisodes qui n’ont pas grand impact sur le reste (voir aucun impact du tout). Le grand final de la série est bien exécuté et m’a laissé plutôt satisfait, mais au fond, si je n’avais pas vu cette 3e saison, je crois que j’aurais apprécié la série tout autant…


J’ai joué à :


The Case of the Golden Idol: The Spider of Lanka / The Lemurian Vampire - J’avais besoin de quelque chose d’un peu plus court dans cette semaine sacrément dense, mais je ne voulais pas laisser complètement mes neurones en jachère : l’occasion idéale d’enfin explorer les deux DLC (downloadable content, si tu savais pas) de The Case of the Golden Idol, le jeu d’enquête/phrases à trous ! Sans surprise, il s’agit ici de 2x3 chapitres bien plus courts que le jeu de base mais qui ne renient en rien sa complexité : j’ai eu un mal de chien à résoudre la première affaire de The Spider of Lanka, mais une fois mes habitudes remises en place, le reste m’a paru à la fois tarabiscoté et accessible, ce qui est un bon équilibre. Outre de nouvelles mécaniques de jeu (notamment, dans The Lemurian Vampire, le concept d’accéder à la même scène à différents points dans le temps) qui renouvellent le gameplay sans nous perdre, les deux DLC comblent surtout quelques trous dans le récit, l’amenant avec élégance au point de départ du jeu de base. C’était une petite promenade très agréable, et maintenant j’ai hâte de découvrir The Rise of the Golden Idol qui devrait pointer son nez dans un futur pas trop lointain !


J’ai écouté :


Dirk Thornton, E.P. - En 2007, Richard Terfry fait équipe avec DJ Flip et ils sortent ensemble deux 7” : Catwalk b/w Chokehold (un son mellow sur des paroles mystérieuses, ou l’inverse, et le flow le plus incroyable de Buck 65 pour l’époque) et Yesterday’s News b/w Run (un son bien métallique et un autre à nouveau mellow, dont je jurerais avoir déjà entendu le sample quelque part)… Ça aurait pu s’arrêter là, quatre titres bien tassés, et voici qu’en 2015 l’ensemble s’augmente de 3 pistes, franchement moins inspirées : le gênant “Brazil”, “The List” que n’aurait pas renié l’OuMuPien Mickaël Mottet et l'oubliable “Most Wanted”. Une entrée donc relativement mineure dans le catalogue de Buck 65, mais il fallait bien la mentionner…


Buck 65 With Symphony Nova Scotia - Comme l’écrivait Sophian Fanen, « lorsqu’on a plus rien à dire, c’est le moment de le dire avec un orchestre de vingt violons et treize violoncelles ». Je ne crois pas que Richard Terfry était dans une impasse créatrice en 2008 (au contraire, il était sans doute dans la période la plus créative de sa carrière) mais force est de constater que ce concert, enregistré mais jamais sorti officiellement, se fait plaisir avec cette alliance inattendue entre hip-hop et orchestre symphonique. Ça marche globalement plutôt bien : on y retrouve des titres tirés de Secret House Against the World, d’autres de Talkin’ Honky Blues ou de Dirtbike, le “Yesterday’s News” mentionné plus haut, un titre de Bike For Three! dont il va bien falloir parler la semaine prochaine, un poème de 16 minutes avec des scratches au milieu… Il s’agit là aussi de quelque chose à clairement réserver aux fans et clairement, j’en fais partie ! C’est assez facile d’arracher des frissons avec des envolées symphoniques, je le reconnais même si ça marche totalement sur moi. Et puis tout de même, cet enchaînement entre “Swan Lake” et “Way Back When”, c’est quelque chose…


L’arrière-queer de Milouch :


Écrire pour les sœurs - Je reconnais les livres intenses au fait que j'y devient physiquement accrochée. Ça m'est arrivé sur peu de textes mais je me retrouve à serrer la couverture, à tordre les pages parce que ce que je lis est trop fort, résonne trop... Ce livre est un de ceux-là. Écrire pour les sœurs, c'est une anthologie de textes transfem. On y retrouve des contributions de Lizzie Crowdagger, Louise Bihan, Joyce Rivière et bien d'autres. Il y a de la poésie, des essais politiques, de la tranche de vie, de la science-fiction... Comme dans toute anthologie, il y a une grande disparité entre les textes. Certains m'ont touchée, m'ont obligée à fermer le livre parce qu'ils étaient trop vrais, il y en a qui m'ont émue jusqu'au larmes, d'autres un peu moins. Est-ce que je recommande pour autant cette anthologie ? C'est compliqué. Lire ce livre était une expérience très intense. C'était pour moi comme regarder un miroir. Je voyais dans les textes des pensées que j'avais eue, des situations que j'avais vécues, des rêves qui m'avaient poursuivis... Pour moi c'est un livre extraordinaire mais peut-être qu'il ne parlera qu'à moi. Je pense qu'il peut être une forme de reflet pour d'autres personnes trans et peut-être un moyen de comprendre certaine choses pour les personnes cis. Toujours est-il que je suis absolument convaincue qu'il est nécessaire. 


Et toi,


qu’as-tu compoté cette semaine ?


Des bises


et peut-être à dimanche prochain !


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